"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

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Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

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Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

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CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions
Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE
de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

dimanche, mars 01, 2009

MILLEFEUILLES
Source : lemonde.fr en ligne le 26 février



L'encombrant statut de "nièce de"


Sylvie Weil est avant tout une nouvelliste (1), et son livre de souvenirs familiaux, Chez les Weil, est, en 38 brefs chapitres, une succession de nouvelles, où l'on retrouve son regard aigu sur la réalité, son sens du détail, son humour, sa férocité, qui ne conduit jamais au règlement de comptes, et sa tendresse, qui ne s'abîme jamais en dévotion.

Ce n'est pas une biographie familiale au sens où on l'entend généralement. Sylvie Weil ne retrace pas la courte existence de sa tante, la philosophe Simone Weil, morte l'année de sa naissance. Pas plus qu'elle ne revient avec précision sur la carrière de son père, le grand mathématicien André Weil (1906- 1998), cofondateur du fameux groupe baptisé du nom d'un savant imaginaire, Bourbaki. André Weil a lui-même raconté sa vie avec beaucoup d'ironie dans Souvenirs d'apprentissage (éd. Birkhauser, 1991).

Ce récit, qui fait magnifiquement revivre ce frère et cette soeur se sentant presque jumeaux, tous deux surdoués - André Weil a eu dès l'âge de 7 ans la passion des mathématiques -, est aussi pour Sylvie Weil une manière de se libérer d'un lourd héritage. Dès son plus jeune âge, elle a ressemblé à sa tante, physiquement, de manière frappante. Et quand on sait quels enthousiasmes suscite la figure de Simone Weil, on imagine ce qu'elle a dû subir. "Si vous n'avez choisi ni l'incognito dans un monde qui vous est étranger et vous déplaît - en l'occurrence celui de la mode -, écrit-elle, ni l'exil en Patagonie, il reste le rôle intéressant, mais ambigu, de relique : le tibia de la sainte. Des gens que vous n'avez jamais vus de votre vie se précipitent vers vous, rouges de plaisir, "Mon Dieu, quelle ressemblance, je vous ai reconnue tout de suite !""


"LE TIBIA DE LA SAINTE"

Le jour de son premier succès, en 1959, lorsque le général de Gaulle lui remet son prix au concours général, il ne lui dit qu'un mot, "J'ai beaucoup aimé votre tante". "Et ce n'était même pas vrai, remarque aujourd'hui Sylvie Weil. A Londres, il avait dit qu'elle était complètement folle."

Bien sûr, Sylvie Weil ne s'est jamais contentée d'être "le tibia de la sainte". Elle a quitté l'appartement familial de la rue Auguste-Comte - cela a toutefois été un crève-coeur de le vendre après la mort de son père -, est devenue professeur de littérature, vit à New York depuis de nombreuses années, et écrit, non seulement des nouvelles, mais des romans et des livres pour enfants.

"Il y a longtemps que j'avais l'idée d'écrire ce texte, explique- t-elle. Pas du tout pour m'attrister ou me plaindre. J'avais ouvert un dossier "nièce de". J'y prenais des notes, plutôt sur un mode comique, sur certains propos, certaines rencontres. Je ne suis pas philosophe, je ne suis pas mystique, et quand on me dit au sujet de ma tante "Elle m'a sauvé du suicide quand j'avais 16 ans", j'ai du mal à comprendre. En revanche, je comprends très bien qu'on soit fasciné par son refus absolu du compromis. Moi aussi je l'admire pour cela. Je n'ai pas à me venger, je n'ai pas été une victime, mais Simone m'a encombrée. Il me fallait reconnaître qui je suis, comment j'ai été définie par cela, faire renaître ce "lieu Weil", l'appartement de la rue Auguste-Comte, dont je possède toujours les meubles, venus d'autres pays, au fil des exils de mes grands-parents et arrière-grands-parents. Et puis j'étais follement attachée à mon père. Le monde sans lui est différent. Et son immense culture me manque."

Ce père insupportable et merveilleux, qui parle de nombreuses langues, a lu toute une bibliothèque, est l'un des plus beaux personnages du livre. Il refuse d'encombrer sa mémoire de mots inutiles, donc, à table, si manque le sucre, par exemple, il fait "un grand geste de la main, une sorte de moulinet", à charge pour sa femme ou ses filles de comprendre ce qu'il veut. Il réprouve les conversations anodines, "oiseuses", mais il est si fascinant qu'on ne peut lui en vouloir.

Quant aux grands-parents, Bernard et Selma, Sylvie Weil les a toujours vus recopier ligne à ligne les cahiers noirs de leur fille Simone, "comme deux bons élèves", comme pour ne jamais la quitter.

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