"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

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Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

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Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma  Ed Universlam


CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions
Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE
de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

dimanche, septembre 04, 2005

OPINIONLIBRE
de Maurice-Ruben HAYOUN*



ISRAËL SANS GAZA
La fracture interne


L'évacuation des implantations juives de la bande de Gaza tient le monde entier en haleine ;elles sont presque achevées et se déroulent, pour l'instant, sans heurts graves. Ceux qui, à l'intérieur ou à l'extérieur d'Israël, s'attendaient à une résistance acharnée -voire, armée- des habitants de ces colonies, ont formulé des pronostics qui ne se sont pas avérés. Désormais Israël vivra sans Gaza et Gaza ira vers son destin sans Israël. Mais est-ce à dire que ce désengagement ne laissera pas de traces et se limitera à un simple retrait territorial, comme celui du Sinaï il y a une vingtaine d'années ? Rien n'est moins sûr… Le traumatisme est profond et ses répercussions modifieront profondément la vision que les citoyens d'Israël ont du sionisme. Une brève rétrospective sur ce que représente ce territoire dans le vécu, le penser et l'imaginaire juifs depuis la Bible, peut être utile. Contrairement à Jérusalem, la cité du roi David, mentionnée dans la Bible hébraïque un peu moins de quatre cents fois, Gaza ('azza en hébreu) connaît moins de vingt-cinq occurrences. Dans les livres de la Genèse et des Juges, qui comptent parmi les strates les plus anciennes de la littérature biblique, Gaza ne sert que de repère géographique, de marqueur de limites. Enfin, deux prophètes, Amos (1 ; 6-7) et Sophonie (2 ; 6) apprécient peu Gaza : le premier manifeste son hostilité par des imprécations tandis que le second lui prédit un avenir sombre : elle sera, dit-il, désertée par ses habitants, ce qui, dans la bouche d'un prophète d'Israël, est la pire des malédictions. Ces quelques références indiquent que Gaza ne joue de rôle majeur ni dans l'histoire biblique d'Israël ni dans la pensée sioniste moderne. Alors pour quelles raisons les différents gouvernements d'Israël, de droite comme de gauche, y ont favorisé des implantations juives et accordé à ceux qui s'y installaient d'importants avantages fiscaux ainsi qu'une protection militaire disproportionnée ? La seule réponse qui résiste à la fois à l'examen et à la critique est la suivante: dès l'origine, cette installation fut conçue comme une monnaie d'échange dont la logique de développement (constructions en dur, expansion de la population, installation de bases militaires, travaux agricoles) devait inquiéter la partie arabe et l'inciter à composer en restreignant ses revendications. Mais pour que ce plan prospère -même si, dans l'esprit de ses concepteurs, sa pérennité n'était pas assurée- il fallait faire croire aux volontaires que Gaza était aussi «importante pour la défense d'Israël que la banlieue de Tel-Aviv.» Pourtant, certaines déclarations assez anciennes auraient dû retenir l'attention des Israéliens. David Ben Gourion, par exemple, se méfiait de Gaza qu'il n'avait pas souhaité occuper après la campagne de 1956 ; et onze ans plus tard, Moshé Dayan, alors ministre de la défense, ne souhaitait guère plus s'y installer. Les réticences de ces deux grandes figures historiques s'expliquent par des considérations exclusivement démographiques : aucune population juive n'aurait jamais pu remporter ce que l'on nomme d'un terme hideux, «la guerre des berceaux.» Le Moyen Orient a connu hélas ! bien des guerres -et notamment une Intifada des enfants- mais, de grâce, n'étendons pas la confrontation aux bébés… Pendant trente-huit ans on a préféré occulter cette évidence qu'est cette grave disparité démographique : il suffit de s'en référer aux propres déclarations d'Ariel Sharon -successivement ministre des infrastructures, du logement et de la défense- pour s'en convaincre. Il jurait alors que jamais, au grand jamais, Israël n'abandonnerait les implantations. Comment s'explique cette volte-face de l'actuel Premier Ministre ? Lors de la dernière rencontre de Charm el Cheikh, Ariel Sharon n'a pas hésité à dire publiquement, en présence de chefs d'Etats arabes, qu'il ne fallait plus poursuivre des «rêves irréalistes» et qu'il convenait d'adopter désormais une attitude raisonnable. Un rejet aussi explicite du Grand Israël était inouï jusqu'ici. Mais à pousser jusqu'au bout la logique d'un tel raisonnement, Ariel Sharon aurait dû se dire que la création même de l'Etat d'Israël en 1948 avait été «irréaliste» au regard des forces en présence : un Etat d'Israël encore dans les limbes, une armée embryonnaire, un monde sorti exsangue de la seconde guerre mondiale et des armées arabes massées aux frontières. Le jeune caporal Sharon eût alors jugé la victoire impossible et même la survie peu probable… Et pourtant !Conscient de la fracture interne qui menace la nation, le Président Katsav a présenté ses excuses aux familles expulsées de leurs foyers. Son intervention a été perçue comme l'expression d'une authentique compassion avec des familles brusquement chassées de leurs foyers. Sur un autre registre, le Premier Ministre a présenté les choses d'une manière plus sobre : il faut quitter ces positions devenues indéfendables si l'on veut conserver l'essentiel.De telles secousses ne peuvent que porter préjudice à l'unité de la nation : les électeurs israéliens n'oublieront pas de sitôt ces images où soldats et policiers juifs expulsent manu militari leurs compatriotes. Pas plus que les attentes pathétiques de miracles qui ne vinrent pas. Et, dernier mais non moindre : des soldats juifs chassant d'autres juifs de chez eux ou de ce qu'ils considéraient comme tels. L'esprit pionnier, l'idéalisme des kibboutzim, l'enthousiasme qui animait alors les fondateurs de l'Etat et l'ensemble de la nation, semblent connaître une éclipse durable. Et le retrait de Gaza, même s'il pose les jalons d'une subtile victoire diplomatique à venir, n'a fait que l'aggraver. On peut dire que cet acte constitue un tournant important : pour les uns, il est à marquer d'une pierre blanche puisqu'il prouve aux yeux du monde entier qu'Israël n'en fait pas qu'à sa tête, tient compte des demandes de l'Europe et des Etats Unis et évacue un territoire de son plein gré et sans autre contre partie qu'une promesse de paix; pour les autres, c'est un précédent dangereux, un reflux pour ne pas dire une défaite du sionisme alors que cette idéologie est, depuis toujours, la raison d'être de l'Etat d'Israël. C'est cet aspect des choses qui retiendra l'attention au cours des mois à venir : Ariel Sharon peut, certes, faire éclater le cadre rigide d'un paysage politique en gésine de rénovation, il ne pourra pas, dans de telles conditions, «refonder» le sionisme. Le voudrait-il qu'il ne le pourrait. Or, c'est précisément ce dont Israël a besoin pour poursuivre sa route et continuer de croire en son avenir. Ceux qui ont été contraints de quitter leurs foyers, imprudemment fondés à Yamit (Sinaï) et à Gaza, ne pourront pas ne pas faire un parallèle avec la situation actuelle en Cisjordanie. Or, la population israélienne qui y vit avoisine le quart de million d'âmes. Son rapatriement dans un Etat d'Israël revenu aux frontières de 1967 relève de la mission impossible. Pourtant, Ariel Sharon a absolument besoin de la confiance de ses concitoyens pour mener à bien le second volet de l'opération qui consiste justement à rendre irrévocable une importante présence israélienne en Cisjordanie. Comment éviter cette quadrature du cercle ? Au risque de paraître iconoclaste, on peut formuler une interrogation qui gît au fondement même de toute l'entreprise : si Israéliens et Palestiniens sont appelés à co-exister pacifiquement un jour, pour quelles raisons un nombre restreint d'agriculteurs juifs ne pourraient-ils pas demeurer à Gaza et en Cisjordanie pour faire bénéficier leurs voisins palestiniens de leur savoir-faire, participer au développement des cultures et jeter les bases d'une vaste coopération ? Comment continuer à prétendre que ces deux peuples n'épargnent pas leur peine pour vivre un jour en paix alors que tout (la barrière de sécurité, l'évacuation etc…) est fait pour les séparer hermétiquement l' un de l'autre ? Etait-il inconcevable de louer ces terres ou de conclure une sorte de bail amphithéotique avec des clauses impliquant, par exemple, l'emploi d'une main d'œuvre palestinienne et la formation d'ingénieurs agronomes ? A l'arrière-plan de telles utopies se profile -hélas !- l'ombre menaçante de la haine et du rejet. Des siècles d'antagonisme et des décennies d'occupation ne pourront pas disparaître du jour au lendemain. L'ancien Secrétaire d'Etat Henry Kissinger avait dit jadis que les Etats Unis se portaient garants de la défense d'Israël mais que cela n'incluait pas les conquêtes d'Israël. Au fond, Gaza sera bientôt vidée de toute présence israélienne, mais Israël n'en a pas encore fini avec Gaza.
(ce texte a été publié dans le quotidien suisse
LA TRIBUNE DE GENEVE daté du 8 août 2005)
Maurice-Ruben HAYOUN
*Philosophe, écrivain.
Dernier ouvrage paru,
Ecoute Israël, écoute France
Editions Armand Colin 2005

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