"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

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Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

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Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

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CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

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Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

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de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

mercredi, avril 28, 2010

LEDEBATSURLECONFLIT
ISRAELOPALESTINIEN
FAITRÂGE

Source : lemonde.fr en ligne le 28 avril
à 12h 38
sur Diasporablog à 13h 15


Le conflit israélo-palestinien
rend-il aveugle ?


par Jérôme Bourdon*


A lire les débats sur le conflit israélo-palestinien, on est frappé par l'aveuglement dont font preuve les intervenants. En ceci les pro-Palestiniens et les pro-Israéliens se ressemblent jusqu'à la caricature. L'hypercritique et l'hyperjustification – dont le dernier papier d'Eric Marty dans ces colonnes donne un exemple frappant – se répondent point par point. Commençons par l'hyperjustification : la responsabilité du conflit incombe d'abord aux ennemis d'Israël, qui ont pour but de détruire l'Etat, les militants pro-Palestiniens (par exemple ceux qui plaident pour un boycott, sous diverses formes) sont au fond animés par l'antisionisme et l'antisémitisme, la gauche et singulièrement la gauche radicale nient l'antisémitisme et sont envers l'islamisme, voire l'islam tout court, d'une indulgence coupable, et enfin Israël est la seule démocratie du Proche-Orient, où ne règnent que des inégalités "conjoncturelles" (les Arabes citoyens israéliens, et aussi une bonne partie des juifs sépharades, apprécieront), et "l'unique fondement" du mur de séparation est la lutte contre les attentats-suicides.


L'hypercritique nous dit qu'Israël est à peu près le seul responsable du conflit, que l'antisémitisme est d'abord un argument utilisé par Israël pour se justifier, que si antisémitisme il y a Israël et ses défenseurs en portent d'abord la responsabilité, que le mur a pour fondement l'apartheid… Tous aveugles ! Les pro-Palestiniens, au premier chef, dans leur négation de l'antisémitisme, et dans leur inconscience de ce que l'antisionisme radical permet de recycler la haine antijuive. Les pro-Israéliens, au premier chef, sur la politique israélienne qui "se défend maladroitement contre les menaces de destruction" ; à cet égard, il suffit de regarder la carte du mur pour comprendre que son "but unique" est loin d'être la lutte contre les attentats, qu'il mord profondément sur les territoires, poursuit un mouvement de conquête et d'occupation et contribue donc au désespoir et à l'épuisement des Palestiniens (et une traversée de la Cisjordanie suffit aussi pour se rendre compte du caractère très artificiel de "évolution économique prometteuse").

On pourrait continuer indéfiniment à montrer que de tous côtés les superlatifs remplacent l'observation : l'armée israélienne, sur le long terme, a commis moins de massacres et de crimes de guerre que bien d'autres armées, mais il est aussi absurde de prétendre qu'aucun soldat israélien n'a commis de "meurtres délibérés de civils" (les témoignages recueillis par un ancien officier de Tsahal, et son organisation, "chovrim tshtika", racontent exactement le contraire, ou encore, pour un cas particulier, le dernier film d'Avi Mograbi). Israël n'est pas un régime d'apartheid et la vitalité du débat démocratique, même sans avoir besoin de le comparer avec ses voisins, y est incontestable. Ce qui n'empêche pas, aussi, l'oppression économique de la minorité arabe à travers une discrimination (notamment pour ce qui concerne, à nouveau, la propriété des terres) profondément intégrée aux pratiques de l'appareil d'Etat.

Au moment où, dans un débat, la première ligne d'un article permet de prévoir avec exactitude tout le reste (qu'il soit pro ou anti-Israélien), on comprend que le besoin de croire, qu'il s'agisse d'idéaliser ou de diaboliser les uns ou les autres, compte plus que le besoin de comprendre. La cause de la paix, hélas, a suffisamment d'ennemis politiques puissants : Eric Marty signale ainsi, cette fois avec raison, l'impuissance politique des dirigeants. Elle n'a pas besoin d'une cohorte d'aveugles qui s'apostrophent, à des milliers de kilomètres du conflit : on s'apostrophe assez sur place.

Dans cette polémique, Israéliens comme Palestiniens auraient tort de penser qu'ils trouvent des alliés : le conflit demeure ici le prétexte à un théâtre polémique déjà ancien, qui, si l'on en croit un sondage récent, ne convainc plus personne, et notamment pas les plus jeunes qui disent n'y plus rien comprendre.


*Jérôme Bourdon est professeur à l'Université de Tel-Aviv, chercheur associé au Centre de sociologie de l'innovation, à Paris. Dernier ouvrage paru : Le Récit impossible. Le conflit israélo-palestinien et les médias (INA et de Boecke).

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