INEDIT
LES REFUGIES PALESTINIENS
Le Congrès Juif Européen et le C.R.I.F viennent d’organiser au Centre de Conférences Internationales, un colloque sur le thème : « Les Réfugiés Palestiniens ». L’une des questions majeures au cœur du processus de négociations entre Israéliens et Palestiniens.
Pour la première fois, deux importantes institutions juives françaises ont convié, parmi les intervenants, un membre éminent de la société palestinienne :
Bassem Eid.
Ce palestinien, né, il y a une cinquantaine d’années, dans la partie juive de Jérusalem, hébreuophone, conférencier, expert en droit international, a fait ses premières armes, dans sa branche, aux côtés de l’association israélienne de défense des droits de l’homme, BETSELEM.
En 1996, il crée une ONG palestinienne, chargée de veiller, de répertorier et de signaler toute violation aux respects des droits de l’homme à l’intérieur des territoires palestiniens. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir une étroite collaboration avec ses homologues à tous les niveaux de compétences (la torture dans les prisons palestiniennes, la peine capitale, le fonctionnement du système judiciaire, la corruption, les arrestations arbitraires,…)
Bassem Eid, sur tous ces sujets, ne mâche pas ses mots. Il dit tout haut ce que beaucoup de palestiniens, contrairement aux idées reçues, pensent tout bas.
Il sait qu’à tout moment, sa vie est en danger. Mais, qu’importe, pour ce militant combatif, ce qui compte, c’est de rendre meilleur la situation de la société palestinienne à laquelle il appartient.
Depuis six ans, il fournit, chaque année, sous forme d’un rapport, une analyse complète de la situation des droits de l’homme dans les territoires gérés par les classes politiques palestiniennes.
Ces conclusions sont sans appel. Les droits de l’homme sont bafoués et se dégradent chaque jour un peu plus.
Diasporablogj. a rencontré, à l’occasion de sa venue à Paris, à la veille du colloque auquel il a été convié, cette personnalité palestinienne, sinngulière, atypique, dont les propos ne manquent ni de franchise, ni de clarté et tranchent, vigoureusement, avec les propos officiels.
INTERVIEW
de BASSEM EID,
Directeur d’un organisme palestinien
de Défense de Droits de l’Homme :
« Depuis l’arrivée au pouvoir
du Hamas dans les territoires,
les Droits de l’Homme
sont de pire en pire »
Vous venez d’être invité par le Congrès Juif Européen et le C.R.I.F., principales organisations juives françaises. C’est la première fois qu’un responsable palestinien est convié, par ces institutions, à intervenir sur un thème crucial « Les Réfugiés Palestiniens ».
Vous, palestinien, quelle définition donnez-vous au terme « réfugié » ?
C’est un terme très complexe à définir dans le contexte des relations entre Israéliens et Palestiniens. Chaque gouvernement, israélien ou palestinien a sa propre définition.
Un réfugié est une personne qui a quitté son pays et qui a encore le droit d’y revenir. Quelque soit les endroits qu’il a quitté, il doit pouvoir y revenir. Par exemple, la personne qui a quitté Haïfa ou Jaffa doit pouvoir revenir dans ces villes ou dans les territoires.
Avant qu’on en vienne à discuter des Réfugiés palestiiens dans les futures négociations entre Israéliens et Palestiniens, il faudra, au préalable, se mettre d’accord, sur l’interprétation que chacun fait sur l’Histoire du conflit, et par conséquent, et donc de l’Etat d’Israël ;
Deux interprétations s’affrontent, comme vous le savez.. Laquelle vous paraît être la plus raisonnable ?
Israéliens et Palestiniens ont, il est vrai, des approches différentes, et même très opposées de leur Histoire.. Toutefois, par exemple, dans les accords de Genève (Yossi Beilin, Abed Rabo), il n’est fait aucune allusion sur les droits aux retour des Réfugiés Palestiniens. Ce droit des réfugiés devraient leur être reconnu tant qu’ils sont citoyens des pays dans lesquels ils vivent en vu d’obtenir une compensation.
Selon moi, des pays comme la Syrie ou le Liban tentent d’utiliser la carte du retour des réfugiés palestiniens pour faire pression sur les négociations au risque de faire échouer la solution définitive de ce conflit.
Comment expliquez-vous que la question des réfugiés palestiniens soit venue si tardivement sur la table des négociations ? Quelles étaient, selon vous, les intentions réelles de Monsieur Arafat à ce moment-là ?
Parce que c’est un sujet sensible. Un sujet au cœur du conflit israélo-palestinien. Les Israéliens et les Palestiniens, depuis les accords d’Oslo, ont chercher à le repousser à chaque stade des pourparlers.
Arafat était à l’époque un héros de la paix, comme l’avaient dit Rabin et Clinton et comme il l’a toujours été aux yeux des Français et des responsables politiques français également.
Mais Arafat a porté préjudice à la cause palestinienne.
Comme il a commis autant de préjudices et que dans les six dernières années, qu’il n’a pas agi comme un président devrait le faire, il a agi en individualiste, recherchant une revanche personnelle face à Israël, en laissant son peuple dans un vaste chaos, les Palestiniens ne le regretteront jamais.
Qu’est-ce qui vous paraît être le plus important, avoir un Etat palestinien avec en face un Etat israélien qui accueille les réfugiés palestiniens avec le problème démographique qu’on imagine, ou créer un Etat palestinien qui regrouperait les Palestiniens de l’intérieur et les Palestiniens de l’extérieur, vous pour aider à bâtir le nouvel Etat ?
Tout palestinien est à la recherche d’un Etat indépendant, en paix, aux côtés d’Israël.
D’après moi, aucun Etat palestinien ne pourra intégrer la totalité des réfugiés de l’extérieur et tous les réfugiés ne voudront pas revenir dans un Etat palestinien. Même s’ils revenaient dans un Etat palestinien qui s’élargirait jusqu’au frontières de 67, ils resteraient considérés comme des réfugiés. C’est lA raison pour laquelle, ils n’auront aucune envie de s’installer dans ces territoires. Pour ces personnes qui sont nées et qui ont bâti toute leur existence à l’extérieur des territoires palestiniens au cours de ces cinquante dernières années, c’est très difficiles, pour elles, de recommencer leur vie dans un nouvel Etat .
Les Juifs qui ont été invités à quitter brusquement les pays arabes auxquels ils étaient particulièrement attachés, ne pourraient-ils pas, eux aussi, revendiqués leur statut de réfugiés ?
Ce serait un gros problème. Je pense que les Juifs sont tellement heureux en Israël, que je ne crois pas qu’ils souhaitent retourner, par exemple, en Irak ou en Iran. Les Juifs qui ont laissé leurs biens dans les pays arabes auraient le droit de demander des réparations au même titre que les Palestiniens qui ont quitté la Palestine.
Sur ces sujets, à ce colloque, qu’est-ce que vous vouliez dire à la communauté juive de France ?
Je pense que Juifs et Palestiniens doivent encourager les gouvernements israéliens et palestiniens à régler ce problème le plus rapidement possible. Le conflit israélo-palestinien ne doit être suspendu au problème du droit au retour des réfugiés. Si on arrive à résoudre cette question, il sera plus facile d’aborder les autres sujets. Pour cela, ils ont besoins de dirigeants courageux . Monsieur Olmert doit savoir qu’avec Mahmoud Abbas, ce sera plus facile qu’avec les responsables du Hamas.
Qu’en est-il des droits de l’homme dans les territoires depuis que le Hamas est aux commandes ? En êtes-vous satisfait ?
Les droits de l’homme ont une image dérangeante, surtout à Gaza, depuis le 25 janvier de cette année. Plus de cinquante palestiniens ont été tués par d’autres palestiniens depuis l’arrivée du Hamas. Lors de la campagne électorale, le Hamas avait promis des réformes. Aujourd’hui, il n’en est rien. On ne voit toujours pas de réformes. Les choes sont de pire en pire.
Dans ce domaine voyez-vous une différence entre la période d ’Arafat et celle actuelle du Hamas ?
Il n’y a aucune différence pour le moment.
En tant que responsable d’une organisation de défense des droits de l’homme dans les territoires palestiniens, les affrontements entre les deux partis (le Hamaa et le Fatah), vous inquiètent-ils ?
Monsieur Abbas a son pouvoir d’affaibli. Il y a un conflit ouvert entre l’équipe présidentielle et l’équipe parlementaire. Je ne pense pas que cette incompréhension qui réside entre le Hamas et le Fatah présidé par Mahmoud Abbas puisse être résolu dans l’immédiat.
La menace d’un référendum sur la création d’un Etat palestinien aux côtés d’Israël et le manifeste des prisonniers palestiniens pour mettre fin au conflit israélo-palestinien, vous semble-t-il aller dans le bons sens ?
Le Hamas vient de refuser le compromis de Mahmoud Abbas proposant un référendum sur la création d’un Etat palestinien aux côtés d’Israël.
Ce sera très difficile pour Mahmoud Abbas d’organiser ce référendum auprès des Palestiniens. On ne peut pas influencer ainsi les gouvernements après qu’ils aient été élus. Mahmoud Abbas pense un jour dissoudre le gouvernement en place. Ce serait une grave erreur. Ce serait les premiers pas vers une guerre civile.
Il n’y a pas de droits de l’homme sans démocratie. L’Islam vous semble-t-il être compatible avec les droits de l’homme ?
Il y a des points de controverses entre l’Islam et la démocratie. Si nous voulons établir la démocratie dans les pays musulmans, il faut des musulmans modérés, non des fondamentalistes.. Sinon, c’est impossible !
Les droits de l’homme sont plus respectés par l’Islam que par certains musulmans. Prenons l’exemple de la Turquie. Elle représente un Etat musulman modéré. On peut imaginer ce qui se passerait si la Turquie faisait partie de l’Europe. Personne ne croirait que c’est un Etat musulman. J’espère que le Hamas s’appuiera un jour sur cet exemple.
Propos recueillis par
Bernard Koch
Photo Alain AZRIA
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