DIALOGUE
ATROISFOIS
Source : lacroix.com en ligne le 21 juillet
Hassan de Jordanie :
"Chrétiens, musulmans, juifs sont appelés
à vivre ensemble"
Soucieux de l’échange entre les cultures, le prince Hassan, oncle du roi de Jordanie, s’inquiète de « l’industrie de la haine » dans le monde arabe et appelle à la poursuite du dialogue interreligieux
La Croix : Le terrorisme a frappé l’Indonésie, le pays musulman le plus peuplé du monde, il y a quelques jours, faisant plusieurs morts. Comment réagissez-vous à ces nouveaux attentats ?
Prince Hassan de Jordanie : Cette idée de porter la bataille dans les capitales anime toujours une certaine internationale islamiste. Ces gens ont des cellules dormantes qu’ils activent au nom d’un soi-disant « djihad ». Pour circonscrire leur activité, il faut s’engager à fond dans la bataille des cœurs et des esprits, répondre aux défis de l’immigration, de la citoyenneté et du multiculturalisme.
Plus de six mois après l’intervention israélienne à Gaza, comment évaluez-vous la situation au Proche-Orient ?
Les colonies israéliennes n’occupent pas seulement le sol, elles accaparent le sous-sol, les ressources hydrauliques, l’eau des nappes phréatiques. C’est un contrôle stratégique. S’il y a une houdna, une trêve à long terme apportant un répit significatif pour permettre aux négociateurs de travailler sans être perturbés par une augmentation de la violence chaque fois qu’ils ouvrent la bouche, je pense que l’idée de protectorat temporaire par une agence internationale de stabilisation mérite d’être examinée.
De même, il faut promouvoir une vision supranationale de la gestion des ressources naturelles, humaines et économiques de la région et organiser une conférence de capacités sur le statut des réfugiés pour développer la citoyenneté et l’État. Sinon, on aboutira à une situation similaire à celle de Soweto où la reconstruction est entravée par l’hostilité des populations qui nourrit l’extrémisme.
Vous affirmez que « l’industrie de la haine gagne » dans la région arabe qui abritera 55 millions de jeunes chômeurs en 2050. Quel est, selon vous, le bon modèle à suivre dans le monde musulman ?
Le Sud-Est asiatique peut-être un modèle pour les Arabes, avec sa combinaison de gouvernement, de secteur privé et de société civile. Les sociétés arabes sont lobotomisées par la mauvaise gouvernance, les inégalités et le manque d’éducation. Dans les pays où les dirigeants autoritaires ont prévalu, le concept de conversation et d’écoute s’est atrophié. Charte du citoyen, charte sociale, fonds de cohésion, charte de l’énergie, micro-justice et micro-finance sont des voies authentiques à explorer.
Pourquoi la région arabe productrice de pétrole ne pourrait-elle pas protéger les ressources énergétiques mondiales tout en développant des politiques fondées sur la sécurité humaine ? Si nous ne mettons pas de l’ordre dans notre région, si nous ne donnons pas la priorité à la population et que nous continuons la guerre contre la terreur pour acheter toujours plus d’armes, renforcer les services de police, faire venir des bases et des marines étrangères, je ne vois pas comment on s’en sortira.
Sur la question du changement climatique, le monde arabe souffre d’une absence de représentation. Nous avons besoin d’une organisation régionale commune qui inclurait Israël, parce que nous supporterons ensemble les conséquences économiques et sociales du changement climatique. De même, une guerre nucléaire ou conventionnelle entre l’Iran et l’État hébreu affecterait tout le monde arabe. C’est pourquoi nous devons mettre en œuvre collectivement une diplomatie préventive dans le domaine des armes de destruction massive.
Que pensez-vous de la situation en Iran ?
Des différences d’opinion apparaissent à Qom dans le haut clergé chiite. Le changement viendra de l’intérieur, de l’establishment politique et religieux. C’est à porter au crédit des musulmans chiites qui sont mieux éduqués, plus ouverts dans leur formation religieuse, et qui commencent à envisager les problèmes d’aujourd’hui dans le contexte d’aujourd’hui.
En 1999, vous avez fondé à Genève, avec l’appui à l’époque du cardinal Joseph Ratzinger, la Fondation pour la recherche et le dialogue interreligieux et interculturels. Quel jugement portez-vous sur ce dialogue ?
C’est un dialogue entre les fidèles des différentes religions, pas entre les religions. Le problème, depuis plusieurs années, c’est l’écart entre, d’un côté le rite et la pratique religieuse et, de l’autre, l’impact de la religion sur la culture. Les religions et les communautés semblent s’éloigner les unes des autres.
Pourtant chrétiens, musulmans et juifs sont des êtres humains appelés à vivre ensemble. Cela ne veut pas dire que nous devons nous mettre d’accord sur tout, mais qu’il doit y avoir un cadre civilisé pour le désaccord.
Quelle que soit la solution qui sera trouvée à Jérusalem, il reste à créer une autorité morale des croyants, avec des communautés musulmane, juive et chrétienne capables de s’asseoir ensemble.
Aujourd’hui, cette dynamique fait défaut. Quand le président Poutine visite les Lieux saints, il donne l’instruction d’y établir un monastère. C’est un engagement en faveur de la continuation des rites et de la pratique religieuse, mais cela ne va pas au-delà.
Comment avez-vous réagi au discours du pape à Ratisbonne en septembre 2006 ?
Le pape a cité l’empereur byzantin Manuel II Paléologue. Pour de nombreux observateurs, il a voulu souligner la différence de point de vue entre byzantins et musulmans. Malheureusement, la controverse s’est produite à la veille de sa visite longtemps repoussée à Istanbul.
Du coup, la symbolique que nous voulions développer a été occultée. Une fois de plus, des obstacles politiques sont venus entraver le déroulement du dialogue interreligieux. J’avais personnellement espéré que nous – des juifs, des chrétiens et des musulmans –, puissions présenter au pape et au patriarche de la chrétienté orientale les trois sources sacrées – la Bible hébraïque, le Nouveau Testament et le Coran – dans leur langue originale, publiées dans un seul coffret par la Fondation.
Le pape et le patriarche auraient donné leur soutien moral au projet de publication par la Fondation d’une concordance analytique des valeurs partagées des religions abrahamiques.
Cette occasion manquée n’a pas empêché le dialogue de se poursuivre. Les questions de migration, d’inclusion et de citoyenneté deviennent existentielles. Chacun doit être prêt à revisiter l’héritage de l’autre. En arabe, nous disons que la compréhension précède l’entendement.
Dans l’Union européenne, certains insistent sur les racines chrétiennes de l’Europe. En France, Nicolas Sarkozy s’est élevé contre le port de la burqa. Qu’en pensez-vous ?
Partout dans le monde, l’extrême droite professe une idéologie exclusive. L’Europe est multiculturelle. Dans le « Rubik’s cube » de la modernité, les identités sont multiples et hybrides et il faut les consolider. Mais quand Christian Dior fait du hidjab et de la burqa un objet de mode, est-ce que cela les rend plus acceptables ?
La religion n’a rien à voir avec la haute couture. Lorsqu’elle est revêtue pour provoquer ou qu’elle devient un objet de curiosité, la burqa n’est pas une affaire de conscience religieuse. Chacun doit respecter les lois du pays dans lequel il vit. L’urgent, c’est de désintoxiquer nos sociétés de l’extrémisme. On devrait copier l’exemple des Alcooliques anonymes en créant un service d’appel gratuit « extrémistes anonymes »…
Recueilli par François d’ALANÇON (à Genève)
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"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS
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Sortie en librairie début mai 2013
A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE
de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS
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