"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

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Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

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Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

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CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

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Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE
de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

mardi, janvier 31, 2012

LEDOUBLE
VISAGE
DEMARINELEPEN

Source : la newsletter de rue89.com diffusée
le 31 janvier 2012




Autriche :
qui sont ces fachos
avec qui Marine Le Pen

est allée danser ?


Jérôme Segal*



Plongée dans l'histoire de ce bal viennois, auquel était invitée la candidate du FN, avec le spécialiste de l'extrême droite autrichienne Jérôme Segal.

En Autriche, la tradition des bals témoigne d'une splendeur passée, liée à l'Empire austro-hongrois. Il y a le bal de l'Opéra bien sûr – le plus connu –, mais aussi le bal des chasseurs, le bal des juristes, des médecins, des sous-officiers… et encore, depuis 1952, celui de la Fédération des corporations pangermanistes (« Burschenschaften ») qui regroupe chaque année la fine fleur de l'extrême droite européenne, et auquel a participé Marine Le Pen cette année.

Historiquement, ces associations liées aux universités ont joué un rôle positif dans l'unification de l'Allemagne (1871) et dans la défense de la liberté d'expression. Seulement, avec la montée du nazisme, la plupart d'entre elles se sont mises au service du grand Reich... et en ont conservé l'idéologie !

L'Autriche, pas une simple victime
En 1945, alors que les corporations les plus dangereuses étaient interdites en Allemagne, l'Autriche n'accomplissait même pas ces évolutions pourtant élémentaires vers la dénazification, alors qu'elle reprenait sa place dans le concert des nations en se présentant frauduleusement comme le pays « première-victime-du-nazisme ».

Beaucoup d'Autrichiens oublient facilement : c'est Hitler et non Beethoven qui était autrichien et si l'Autriche représentait 8% de la population du Reich, les Autrichiens fournissaient 14% du personnel des SS, 40% du personnel des camps d'extermination… et 70% des services responsables de la logistique de la solution finale sous la direction d'Eichmann (David Art, « The Politics of the Nazi Past in Germany and Austria », 2005, Cambridge University Press, p. 43).

Ce n'est qu'en 1986, lors du scandale lié à l'élection de l'ancien officier de la Wehrmacht Kurt Waldheim à la présidence du pays (celui-ci avait été secrétaire général de l'ONU de 1972 à 1981), que des historiens ont pu se faire entendre [PDF] et remettre en cause la thèse d'une Autriche simple victime.

Une compagnie privée gère le palais

Contrairement aux associations « d'anciens » ou aux fraternités étudiantes qui ont une longue tradition aux Etats-Unis, les Burschenschaften qu'on trouve en Autriche fonctionnent par cooptation, sans être dépendantes des universités.

Une distinction est faite en Autriche entre les corporations où le duel à l'épée est pratiqué sans protection sur le visage (« schlagende Burschenschaften » – littéralement « corporations frappantes »), et celles où cette pratique barbare a été abolie. Le bal qui les rassemble toutes est devenu au fil du temps le point de convergence de toute l'extrême droite européenne.

Que ce soit le Vlaams Belang belge, l'Ataka bulgare ou le Jobbik hongrois, tout ce petit monde semant la peste brune virevolte au son des violons dans la Hofburg, le palais le plus prestigieux de la ville où réside le président autrichien. Comment imaginer que ce lieu si représentatif du pouvoir autrichien puisse être loué à la crème des nazillons autrichiens ? Et bien c'est un effet intéressant du néolibéralisme et plus prosaïquement des privatisations entreprises dans le pays.

C'est une compagnie privée qui gère les lieux, la Wiener Kongresszentrum Hofburg Betriebsges.m.b.H. Et – c'est bien connu – l'argent n'a pas d'odeur. Le chargé de presse expliquait avec candeur, comme c'est reporté dans cet article du quotidien Der Standard :

« Ce bal fait partie des plus nobles qui ont lieu chez nous ; deux tiers des invités sont allemands. Il a lieu depuis des décennies et cela ne fait que trois ans qu'il y a cette excitation autour de ce bal. »



Effectivement, l'extrême droite est tellement implantée dans la société autrichienne que jusqu'en 2009, ce bal ne donnait lieu à aucune protestation. C'est cette année-là que certains se sont rendu compte, par exemple, que cinq recteurs figuraient dans le comité d'organisation de l'édition 2008, dont Peter Skalicky, membre depuis 2003 du conseil d'administration de l'Ecole centrale de Paris (recteur qui, encore en décembre 2009, remettait une décoration à un négationniste notoire).

Rappelons que c'est en l'an 2000 que le parti d'un certain Jörg Haider (grand laudateur de la politique de l'emploi du Reich) est arrivé au pouvoir en Autriche. Ce n'est que six ans plus tard que l'extrême droite a quitté le gouvernement, sans pour autant perdre de sa popularité (contrairement à ce qu'espérait officiellement le chancelier Schüssel à l'époque).

Aux dernières élections nationales (les législatives de 2008), l'extrême droite atteignait 28,5% des suffrages, score correspondant aux sondages actuels en Autriche.

Cette année, parmi les invités du bal de la Burschenschaft Olympia, une certaine Marine Le Pen, venue s'entretenir au passage avec le deuxième vice-président du parlement autrichien, Martin Graf, du parti du sémillant leader Heinz-Christian Strache (41 ans), successeur de Haider, décédé en 2008 [PDF] suite à un accident lorsqu'il conduisait avec 2 grammes d'alcool par litre le sang.

Invitation de David Irving en 2005
Martin Graf fait bien partie d'une de ces nombreuses corporations « frappantes », dont les membres, forcément masculins, se reconnaissent en général par leur cicatrice au visage. La Burschenschaft Olympia à laquelle Graf appartient, et qui perdure depuis 1859, est devenue un groupement ouvertement néonazi. Ils se sont notamment illustrés en invitant en 2005 un négationniste notoire, David Irving, pour une soi-disant « conférence » (Irving dut rester plus longtemps que prévu en Autriche puisqu'il y fit treize mois de prison ! ).

Sur leur site, on lisait il y a peu :

« En tant qu'Allemand, on peut être fier de bien des choses. C'est là que l'expression “n'oublions jamais” prend tout son sens. »

Car cette année, si dans la plupart des pays on commémorait le 27 janvier le 67e anniversaire de la libération d'Auschwitz, les plus hauts représentants de l'Etat autrichien ont préféré, plutôt que de se recueillir ou de débusquer les anciens nazis qui restent dans le pays, autoriser ce rassemblement de fachos (dénomination aussi concise que précise).

Précisons ici que Martin Graf a été élu à son poste en 2008 avec les voix de représentants des deux partis qui président actuellement aux destinées de l'Autriche, le SPÖ des sociaux-démocrates et l »ÖVP des conservateurs chrétiens. Si en France l'UMP tente avec sa composante droite populaire (Mariani, Luca, Vanneste) de briser le relatif « cordon sanitaire » qui existe autour du FN, en Autriche pas de cordon du tout !

« Nous sommes les nouveaux juifs »

Et l'Europe-garante-de-la-démocratie-sur-le-continent, comme réagit-elle ? Rien ! En l'an 2000, il y avait bien eu quelques petites sanctions mais depuis, il y a eu les percées de partis similaires en Italie, aux Pays-Bas, en Bulgarie, en Lettonie, en Suisse… et bien sûr en Hongrie. Les organisations internationales comme l'Unesco ne sont pas plus réactives… au contraire !

A la mi-janvier, la commission autrichienne a décidé de placer la tradition des bals au patrimoine culturel immatériel de l'humanité. Après tout pourquoi pas ? Seulement, dans la liste des bals représentatifs, on ne trouvait pas le bal de l'opéra… mais le bal WKR des fachos ! Devant le tollé suscité, l'Unesco n'a rien trouvé de mieux que de retirer tous les bals, alors qu'il aurait été simple de n'en enlever qu'un.

Alors il reste les citoyens et le monde politico-associatif. Vendredi 27 janvier au soir, environ 6 000 personnes [2 500 selon la police, ndlr] se sont réunies par -2°C pour protester. Au moins, cette année, les manifestations étaient autorisées (en 2011, la police quadrillait la capitale pour que les néonazis et leurs amis puissent se rendre au bal tranquillement, les demandes de manifestations déposées avaient été rejetées).


Vendredi dernier, des associations très diverses appelaient à y participer, qu'il s'agisse d'organisations politiques (les sociaux-démocrates et les verts), confessionnelles (juives et catholiques) ou d'ONG comme SOS Mitmensch ou Zara (qui militent respectivement auprès des étrangers sans-papiers ou contre le racisme).

Malheureusement, les tambours des manifestants étaient loin de perturber les valseurs, confortablement protégés par les forces d'un ordre qui semble en Autriche bien établi. Le lundi 30 janvier, on lisait encore dans la presse autrichienne que lors de ce bal, M. Strache avait estimé que c'étaient les membres des Burschenschaften qui étaient victimes de persécutions, ajoutant : « Nous sommes les nouveaux juifs. »

Marine Le Pen, venue chercher son père ?
Selon lui, le petit feu de Bengale déposé dans la nuit de vendredi à samedi devant les locaux d'une de ces corporations rappelle « la Nuit de cristal » ! Tentant de justifier l'ignoble parallèle établi par le leader de son parti, l'ancien député du FPÖ Klaus Nittmann a affirmé que « les entreprises qui travaillent pour ce bal se voient coller des étoiles juives ». Voilà autant de propos qui rappellent ceux de Jean-Marie Le Pen.

Marine serait-elle venue dans la capitale historique de la psychanalyse pour y chercher son père ? Avec MM. Strache ou Graf, il reste à espérer que lors du bal, elle n'ait pas trouvé son prince charmant.



*Jérôme Segal est blogueur et maître de conférences à Paris-IV travaillant à l'université de Vienne, spécialiste de l'extrême droite autrichienne.

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