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BERNARD DARMON
Israël, le modèle à créer
n’est ni orthodoxe ni laïc
Il y a moins d’un mois j’attirais l’attention sur la problématique inévitable liée à la désignation d’Israël comme Etat Juif et non pas Etat des Juifs ou du peuple Juif. Les derniers évènements mettant en scène des « Juifs orthodoxes » et des « laïcs », éclairent mieux cette problématique.
Quelques rappels concernant les Juifs Haredim (craignant Dieu).
A l’origine du refus d’une majorité des juifs orthodoxes de s’allier au mouvement sioniste et de reconnaître Israël, se trouve le Midrash et l’affirmation de Rabbi Yossi Bar Hanina qui explique que Dieu aurait fait prêter deux serments aux juifs et un serment aux « nations » :
Les juifs se seraient engagés à ne pas échapper à l’Exil et donc à ne pas retourner en masse en Israël, acceptant ainsi la punition divine de la destruction du Temple, conséquences des fautes commises. Les juifs se seraient aussi engagés à ne pas se rebeller contre les « nations idolâtres ». Les nations de leur côté s’engagèrent auprès de Dieu à ne pas opprimer trop durement le peuple juif.
En violant ses serments, le peuple juif s’exposerait aux pires calamités, car selon le Talmud (traité Ketoubot, 111a) il incombe au Messie de rassembler les exilés et quiconque tenterait de hâter ce rassemblement serait écorché par les chasseurs comme les biches (cantique des cantiques III, 5).
Pour ce judaïsme orthodoxe, aucune concession n’est envisageable, seuls la Thora et le Talmud représentent la Loi (divine), codifiée plus tard par la Halakha. Ce Codex est valable en diaspora comme en Israël et ces orthodoxes considèrent dans leur grande majorité l’Etat d’Israël comme un état étranger et en aucun cas comme l’Etat juif. Ces craignant Dieu vivent selon eux en parfaite conformité avec les Lois de la Thora, principalement à Jérusalem et à Bnei Brak, mais aussi à Beth Shemesh ou dans d’autres localités d’Israël. Peu importe l’endroit où ils vivent, ils parlent principalement le Yiddish, vivent en ghettos, et s’imposent les règles de vie les plus strictes possibles. En dehors d’Israël, on les retrouve principalement en Amérique du Nord, avec la communauté Satmar dont le gros des troupes est à New-York dans un quartier de Brooklyn. Les Satmar sont beaucoup plus nombreux et beaucoup plus puissants que leurs opposants très polémistes et médiatiques Néturei Karta. Mais sont d’accord pour appeler de leurs vœux la destruction de l’Etat d’Israël. Il est à noter que ces congrégations juives orthodoxes ont créé en Amérique du Nord le « Central Rabbinical Congres » qui représente un contrepouvoir aux mouvements traditionnels orthodoxes et Lubavitch. Le CRC entretient des relations très étroites avec le mouvement Edah Ha Chareidi en Israël.
Pour ceux qui penseraient que ces mouvements sont composés de quelques centaines de membres illuminés et peu crédibles, dont les positions seraient étrangères au judaïsme, ils doivent savoir que les rabbins qui animent depuis plus de trois siècles ces mouvements Hassidiques sont pour beaucoup d’une renommée immense et tirent les racines de leur réputation des enseignements du Baal Chem Tov (fondateur du Hassidisme). A New-York la communauté Satmar est puissante et bien organisée. Elle est aussi motrice dans le financement des congrégations associées. Pour exemple, le géant New-yorkais de l’informatique et de la vidéo B&H appartient à une famille Satmar, et nous retrouvons leurs membres dans le commerce du diamant, ainsi que dans l’immobilier.
La totalité des mouvements Haredim n’est pas aussi virulemment antisioniste que ceux qui s’expriment sur ce site : http://sionismevsjudaisme.over-blog.com/. Mais dans les faits beaucoup pensent tout bas ce qu’ils expriment.
Devant l’évidente réussite de la création de l’Etat d’Israël et de sa centralité acquise dans le monde et dans le cœur d’une immense majorité de Juifs, certains dans le monde des « Haredim » ont quelque peu atténués cette position hostile au mouvement sioniste sans toutefois pouvoir clairement condamner sur le plan halachique ceux que la presse nomme aujourd’hui les Ayatollahs Juifs. Dans l’épisode de la séparation des femmes et des hommes dans les autobus qui traversent ces quartiers ultra orthodoxes, Le rav Yona Metzger, Grand rabbin ashkénaze d’Israël a estimé « … qu’Israël n’est pas le pays du public ultra-orthodoxe (….). Si nous voulons une séparation (entre hommes et femmes dans les autobus ndlr), il est légitime de créer une entreprise privée pour des lignes spéciales ». Le Grand rabbin sépharade le rav Shlomo Amar a quand à lui précisé : « une personne peut décider d’être sévère avec elle-même mais pas avec les autres ». Les dirigeants religieux, conscients de leur place pivot dans la société israélienne, recadrent ainsi justement les plus illuminés de leurs ouailles. La condamnation reste cependant sur la forme et non sur le fond. On mesure ainsi la difficulté (impossibilité ?) des autorités religieuses officielles à condamner halakhiquement cette position.
Israël un modèle à créer.
Face à ces communautés orthodoxes extrémistes, de nombreuses voix du Monde religieux s’élèvent pour ramener le calme. Lorsque la situation sécuritaire du pays est moins aigue, le personnel politique israélien constate la difficulté à créer et gérer un « vivre ensemble ». Certains comme Netanyahou proposent une séparation entre les laïcs d’un côté et les orthodoxes de l’autre. C’est à mon sens un grave aveu d’impuissance. On ne règle pas les problèmes en séparant les gens (par des murs ?), mais en créant des règles acceptables par tous. Ces règles de vie de l’Etat d’Israël doivent-être inventées dans le respect de la Justice, de la Morale et du respect de la diversité de la Nation Juive. J’ajoute que ce vivre ensemble doit aussi être créé dans les mêmes conditions avec les non-juifs israéliens.
Dans la jeune société israélienne qui occupe une place centrale dans la vie Juive mondiale (donc ça nous concerne aussi en Diaspora), nous avons besoin d’équilibre. Il convient de reconnaître que face aux intégristes orthodoxes, il existe aussi et même en plus grand nombre des extrémistes laïcs qui sont très influents dans les media ainsi que dans de nombreux rouages de la Justice et de l’Etat. Il est évident que parmi les religieux orthodoxes, comme parmi les laïcs, des insensés cherchent à dominer les autres. Dans les Media ou les ultra-laïcs pullulent, ils préfèrent faire part de violences et attiser la haine plutôt que de d’analyser et de rendre compte de la réalité et d’arrondir les choses.
Ces intégristes laïcs eux aussi ont une propension à vouloir exclure les religieux (tous les religieux?), et s’emparent chaque fois que c’est possible de l’intégrisme de ces communautés très minoritaires pour agiter systématiquement les « incroyables risques » que ce judaïsme ultra-orthodoxe représenterait pour la société israélienne. Ces intégristes laïcs voudraient imposer à l’Etat des Juifs un modèle calqué sur les sociétés occidentales et refusent de comprendre que si le judaïsme n’est pas la racine du sionisme, la société israélienne ira à sa perte, tant en ce qui concerne les rapports laïcs et religieux que pour la gestion des droits des non-juifs. Les deux dossiers étant intrinsèquement liés.
Le judaïsme séfarade, beaucoup moins doctrinal que son pendant ashkénaze a beaucoup à apporter dans ce vivre ensemble et serait bien inspiré de ne pas tomber dans le piège des relations binaires et idiotes qui consisterait à faire croire qu’il faut choisir entre deux mauvais modèles (puisque non rassembleurs). Il existe une voie de l’équilibre et cette voie est toujours celle du bon sens. Je pense que des hommes comme le Rav Amsellem sont porteurs de tolérance et d’intelligence, et peuvent être acteurs pour gérer ces situations qui nécessitent de la mesure.
En guise de conclusion je citerai le Rav Kook (traduction Akadem), idéologue du sionisme religieux qui écrivait dans son livre Oroth à propos des trois valeurs que sont « le Sacré, la Nation, et l’Humain » :
« (…) Trois forces s’affrontent actuellement dans notre Nation. Ce conflit se manifeste de façon très évidente en Eretz Israël, même si toute Nation y est confrontée. Il prend racines dans la conscience du genre humain. Nous serions malheureux si nous laissions ces trois forces s’opposer dans la dispersion, la révolte et l’hostilité de clan, plutôt que de les unir et de les conjuguer pour que chacun aide son prochain et le rende meilleur. (…) Ces trois forces sont le Sacré, la Nation, l’Humain. Ce sont là les trois composantes nécessaires de toute vie, la nôtre comme celle du reste de l’humanité.
Quelle que soit leur part respective, on ne trouvera pas un être, pas une société qui ne soit traversé par ces trois forces. Leur convergence est indispensable à toute société qui aspire à se perpétuer. Quand nous constatons que ces forces, au lieu de converger naturellement, s’opposent, alors il nous faut venir au secours de la société. La désunion vide l’esprit et la conscience positive, quand l’énergie s’emploie à nier les autres forces. »
Bernard Darmon
http://bernarddarmon.unblog.fr
Revue de presse, panorama du monde, blog de lutte contre l'antisémitisme et le racisme, ouvert au dialogue, l'autre image d'Israël, la culture juive à la rencontre de toutes les cultures, le monde juif tel qu'il est.
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