"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

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Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

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Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

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CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

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Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

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de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

samedi, décembre 03, 2011

ISRAËL
HAÏFA,
LENECPLUSULTRA
DUVIVRE-ENSEMBLE
AUPROCHE-ORIENT

Source : lemonde.fr en ligne
le 3 décembre 2011



Haïfa : un modus vivendi exportable ?

Lettre du Proche-Orient | LEMONDE | 03.12.11 | 14h24

par Laurent zecchini


Yona Yahav, maire d'Haïfa, a deux tours dans son sac. Le premier relève du numéro de prestidigitateur : à l'issue d'une conversation sur le point de savoir si Haïfa mérite sa réputation de "modèle" de la coexistence pacifique entre juifs et Arabes, il a fait venir sa secrétaire... arabe. "Interrogez-la !", s'est-il exclamé. Le fait est que Rim est plutôt "casher" pour vanter ledit modèle, et raconter que son fils vient de s'engager dans l'armée, une décision prise chaque année par moins de 80 citoyens israéliens d'origine palestinienne.

La seconde surprise du maire sera plus laborieuse. Il lui faudra trente minutes pour retrouver un précieux document, lequel attesterait qu'en 1948, la communauté juive de la ville a demandé aux Arabes de ne pas quitter la cité, preuve absolue, selon Yona Yahav, qu'à Haïfa au moins, les juifs ne voulaient - et ne veulent - que du bien à leurs concitoyens arabes. "A l'attention des habitants arabes de la ville d'Haïfa, commence le texte. Pendant des années, nous avons vécu ensemble dans le respect mutuel et la bonne entente. (...) Notre ville s'est développée et s'est épanouie pour le bien des résidents juifs et arabes, et a servi d'exemple aux autres villes d'Israël. (...) En choisissant la fuite et l'errance, vous n'attirerez sur vous que la pauvreté et l'humiliation, alors qu'à Haïfa, qui est notre ville et votre ville, toutes les portes vous sont ouvertes, à vous et à vos familles, pour trouver du travail et vivre en paix."

Et le maire d'argumenter : "C'est à cause de cette page d'histoire, et parce que le premier maire arabe, Hassan Shoukri, a fait en sorte que cette coexistence se déroule bien, et que ses successeurs (juifs) l'ont imité, qu'Haïfa demeure un modèle de tolérance." Y aurait-il une exception Haïfa ? Peut-être, bien que nombre de villages de Galilée à majorité arabe connaissent une relative tranquillité communautaire. Le problème est que la démonstration du maire s'appuie sur de douteux repères historiques. Le document porte la date du 28 avril 1948. Or, le 22, les mortiers de la Haganah, l'organisation clandestine sioniste, pilonnaient le marché de la vieille ville, où s'était réfugiée une partie de la population arabe.

Il s'en est suivi une fuite éperdue vers le port, puis, par bateaux, vers Acre et le Liban. Autrement dit, le 28 avril, une large partie de la population arabe d'Haïfa avait quitté la ville. Pour les Palestiniens, le bombardement du marché d'Haïfa occupe une place de choix pour étayer l'histoire de la Nakba (la "catastrophe" en arabe), cette fuite et expulsion d'une grande partie de la population arabe de Palestine, en 1948, contestée par les Israéliens.

Dès lors, le "modèle" repose-t-il sur des sables mouvants ? La thèse selon laquelle la population juive a protégé les Arabes, a ses défenseurs : Abraham Yehoshua, écrivain israélien de renom, pense que si la majorité juive et la minorité arabe (13 % de la population, selon le maire, 10 % selon les organisations palestiniennes) d'Haïfa "ont pu mener une coexistence pacifique pendant soixante-trois ans, alors qu'il y avait ailleurs du terrorisme", c'est en raison de cet exemple historique, qui reste "la base solide des relations entre les deux communautés".

Tel est aussi l'avis d'Elias Chacour, évêque Melkite d'Haïfa : "Historiquement, la ville a eu la chance d'avoir des maires ouverts et tolérants." Comme ailleurs, Arabes, juifs et chrétiens sont divisés, mais "nous voulons rester ensemble pour montrer qu'il y a une coexistence possible. Nous ne sommes pas arrivés à l'idéal, mais à un modus vivendi", résume-t-il. Et le maire d'abonder : le trésorier de la municipalité est arabe, comme la moitié des effectifs de la police municipale, et 25 % des 4 300 employés de la ville !

Les plaies sont-elles aujourd'hui refermées ? Le juif Assaf Ron, directeur de Beit Hagefen, le centre culturel juif-arabe d'Haïfa, assure que oui, et le musulman Jafar Farah, directeur du Centre Mossawah, qui défend les droits "des citoyens arabes d'Israël", explique que non, sur la base d'une longue liste de discriminations. La vérité sur Haïfa, ville paisible mais non sans mémoire, se situe quelque part entre les deux hommes. Les apparences, en tout cas, sont sauves : dans le quartier de German Colony, la clientèle et le personnel des restaurants du très méditerranéen boulevard Ben-Gourion, sont indifféremment arabes et juifs.

Passée cette vitrine touristique, il faut s'enfoncer dans les quartiers arabes de Wadi Nisnas, Halisa et Abbas, pour découvrir une réalité sociale moins reluisante, et des souvenirs encore vifs, notamment à propos de la "loi sur la propriété des absents", cette vaste entreprise de spoliation des biens arabes mise en place à partir de 1948. Haïfa est-elle vraiment la ville "la plus tolérante d'Israël", comme l'assure Assaf Ron ? Dans la vie quotidienne, les relations sociales et le commerce, la mixité confessionnelle est une réalité.

"Sur le plan des rapports humains, admet Jafar Farah, c'est mieux que dans d'autres villes." La politique municipale, c'est autre chose : les alliés du maire, pourtant ancien travailliste, sont membres du parti ultranationaliste Israel Beitenou, et non des formations arabes. Malgré ses imperfections, le modus vivendi d'Haïfa perdure, solitairement. Si personne ne pense que l'hypothétique création d'un Etat palestinien provoquerait un divorce entre les deux communautés, nul ne croit davantage que le "modèle" soit exportable. "C'est dommage, soupire Yona Yadav. Ensemble, avec les Palestiniens, nous pourrions faire un paradis en Israël..."

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