COMMEMORATION
DU30èANNIVERSAIRE
DELATTENTATCONTRE
LASYNAGOGUEDE
LARUECOPERNIC
"LA FRANCE N'EST NI UNE RACE,
ELLE N'EST NI UNE MOSAÏQUE,
ELLE EST UN DESTIN COMMUN"
Discours du Premier ministre François Fillon à l'occasion de la commémoration du 30e anniversaire de l’attentat de la synagogue de la rue Copernic, dimanche 3 octobre 2010.
Mesdames et Messieurs,
C’est la commémoration d’un jour sombre de notre histoire qui nous rassemble aujourd’hui, dans une rue chargée d’émotion.
Ici l’âme de la France a saigné. Il y a de cela 30 ans.
C’était pourtant un beau jour d’automne, ce vendredi 3 octobre.
Il est aux alentours de 18h30.
On sort des bureaux, la foule s’engouffre dans les métros, les magasins commencent à ranger leurs étals, les squares des enfants ferment leurs grilles. Paris finit sa journée.
Dans la synagogue, les fidèles sont rassemblés comme chaque veille de shabbat.
Les prières se mêlent paisiblement aux bruissements de la ville, elle qui depuis des siècles abrite la très ancienne communauté juive.
Et puis soudain, l’explosion sèche et violente qui vient foudroyer la vie et frappe - dans la rue, dans la synagogue, dans les habitations et les commerces voisins.
Je me souviens de ce vendredi 3 octobre.
Penché sur ma radio, comme tant d’autres Français, je découvre avec effroi ces cris, ces sanglots, ces premiers témoignages couverts par des sirènes hurlantes.
Je me souviens d’avoir ressenti un choc devant les images d’un quartier dévasté.
Un dégoût aussi devant ce crime perpétré au coeur de Paris, au coeur de la France.
Le regret également de ne pas entendre les autorités trouver les mots justes.
Quarante ans après l’instauration du révoltant statut des juifs par le régime de Vichy, trente-cinq ans après la fin des horreurs de la Seconde guerre mondiale, nul ne pouvait imaginer que le cauchemar pourrait recommencer; que l’on pourrait encore, sur le sol de France, craindre pour sa vie du seul fait de son appartenance à la communauté juive.
Les terroristes ont tué, ils ont blessé, mêlant indistinctement dans le sang provoqué par leur folie meurtrière, des citoyens de toutes origines, de toutes confessions, de tout âge.
Jean-Michel BARBÉ, Philippe BOUISSOU, Hilario LOPEZ FERNANDEZ, Aliza
SHAGRIR : avec ces quatre noms ressurgissent les destins écorchés de quatre vies, quatre vies volées qui murmurent à jamais leur innocence, quatre vies qui, aujourd’hui encore, réclament justice, comme les dizaines de blessés de l’attentat de la rue Copernic et leurs familles.
Je suis là pour vous dire, au nom du Gouvernement et au nom de la France, que la République n’oublie pas : ni le visage des disparus, ni la souffrance des vivants.
Nous le savons, l’enquête fut difficile.
Et au malaise de ne pas avoir pu identifier immédiatement les coupables, enfuis au Proche-Orient, devait s’ajouter la souffrance de ne pas les avoir encore arrêtés et condamnés.
Mais la France ne se démobilise pas; sa police reste en action; sa justice se tient prête.
Nous attendons désormais que l’auteur présumé de l’attentat, contre lequel un mandat d’arrêt international a été délivré en 2008, puisse être extradé par le Canada pour que la justice se prononce enfin.
Mesdames et messieurs,
Concéder aux assassins de la rue Copernic un but politique, ce serait conférer au geste de tueurs un soupçon de circonstances atténuantes. Or rien, absolument rien, ne justifie leur meurtre, pas même les épreuves du conflit israélo-palestinien.
Non, rue Copernic, la question du «pourquoi ?» nous renvoie simplement et froidement à la haine antisémite.
Cette haine a traversé par le passé la France et l’Europe, et ces heures sombres nous ont alerté à jamais sur ses terribles méfaits.
Cette haine prend aujourd’hui d’autres visages, d’autres chemins indignes.
Des cimetières juifs sont encore souillés, des citoyens portant la kippa doivent parfois presser le pas, des injures abominables sont propagées sur internet, des adolescents sont brutalisés pour ne pas avoir caché sous leur chemise l’étoile de David.
Les braises de l’antisémitisme brûlent encore.
Notre fermeté doit demeurer intacte.
La République est et sera toujours intraitable à l’égard de l’antisémitisme, du racisme, de la xénophobie, tous ses maux qui salissent le visage de la France.
La République n’est pas et ne sera jamais indulgente à l’égard de ceux qui veulent la diviser.
La France n’est pas une race, elle n’est pas une mosaïque, elle est un destin commun.
Par delà nos différences spirituelles ou nos origines, nous sommes tous les membres d’une même famille; nous sommes de la même nation, fière, libre et tolérante.
Rue Copernic, dans le souffle de l’explosion, juifs et non juifs, il n’y avait que des victimes.
Voilà la vérité. Voilà ce qui aurait dû être dit à l’époque.
La France, comme toutes les grandes démocraties et comme toutes les nations dont la voix compte, est exposée aux risques du terrorisme depuis longtemps, et elle le demeure.
J’ai reçu mardi dernier les présidents de groupes de l’Assemblée nationale et du Sénat pour leur exposer la situation.
Sans être alarmiste, la vigilance est de mise.
Et cette vigilance se forge dans le souvenir des victimes car la mémoire des morts nous
rappelle à nos devoirs comme elle nous oblige à la lucidité. Lucidité sur les fragilités de la paix, lucidité sur la détermination de ses adversaires.
Ici, nos pensées se tournent vers toutes les victimes du terrorisme.
La liste est longue, trop longue pour que je puisse évoquer ici tous les lieux, mais surtout toutes ces femmes et tous ces hommes qui en furent les cibles. Comme la tradition juive nous y invite, ils mériteraient pourtant d’être cités un à un, comme autant de vies sacrées ôtées à la Vie.
Mesdames et messieurs,
La solidité de notre démocratie ne dépend pas seulement de nos institutions, elle dépend aussi de notre force de caractère.
Le mal triomphe devant la peur, devant l’insouciance, devant l’inaction des hommes de bien.
Mais il échoue toujours devant leur courage.
La France de la liberté, la France de l’égalité et de la fraternité, cette France là nous oblige.
Elle nous oblige à refuser ses chemins de complaisance qui, de compromis en compromission, conduisent à la déroute de nos principes.
Elle nous oblige au souvenir. Au recueillement. Au rassemblement.
Aujourd’hui, 30 ans après les faits, c’est la France toute entière qui, à vos côtés, se penche sur la destinée brisée des innocents fauchés par la haine.
30 ans après les faits, la République n’oublie pas, n’oublie rien, et, ce faisant, elle s’arme de fermeté pour défendre ses valeurs.
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