"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

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Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

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Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

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CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions
Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE
de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

jeudi, décembre 06, 2007

PASSERELLE
Source : liberation.fr via LA LETTRE OUVERTE
les divagation de Raphaël Sorin
en ligne le 6 décembre


Une étoile jaune pour Hélène Berr


C’était une jeune Française et juive, née à Paris en I921, morte à Bergen-Belsen, en avril 1945. Ses parents furent déportés avec elle et périrent en juillet et septembre 1944. Vous vous souviendrez de son nom, Hélène Berr, puisque Tallandier publie son Journal en janvier prochain, avec une préface de Patrick Modiano, et que ce fut l’événement de la dernière foire du livre à Francfort.
Le Journal commence le 7 avril 1942 quand elle revient de chez Paul Valéry, au 40 de la rue de Villejust. Un paquet l’y attendait ; c’est un livre dédicacé d’une écriture très nette, à l’encre noire : «Au réveil, si douce la lumière, et si beau ce bleu vivant.» On ne saura jamais de quel recueil il s’agissait. Et le Journal s’arrête à Drancy le 15 février 1944 sur les derniers mots que prononce Kurtz, le héros d’Au cœur des ténèbres de Conrad : «Horror ! Horror ! Horror !»
Entre ces deux dates, on accompagne cette très brillante angliciste qui va de la rue Soufflot au boulevard Saint-Germain, lit Thomas Hardy ou Elizabeth Goudge, cite Shelley et Shakespeare. Elle rencontre un «garçon aux yeux gris», Jean Morawiecki. Ils écoutent du Bach et du Mozart et se fiancent.
Le 1er juin 1942, la mère d’Hélène lui annonce «la nouvelle de l’étoile jaune».Sa réaction, d’une grandeur unique, se passe de tout commentaire. Il suffit d’en citer cela :
«Chez Mme Jourdan, j’ai rencontré (…) avec qui nous avons discuté de la question de l’insigne (l’étoile jaune). A ce moment-là, j’étais décidée à ne pas le porter. Je considérais cela comme une infamie et une preuve d’obéissance aux lois allemandes.Ce soir,tout a changé à nouveau : je trouve que c’est une lâcheté de ne pas le faire, vis-à-vis de ceux qui le feront.Seulement, si je le porte, je veux toujours être très élégante et très digne, pour que les gens voient ce que c’est. Je veux faire la chose la plus courageuse. Ce soir, je crois que c’est de le porter.»
Et voici ce qu’elle écrit huit jours plus tard :
«Mon Dieu,je ne croyais pas que ce serait aussi dur. J’ai eu beaucoup de courage toute la journée. J’ai porté la tête haute, et j’ai si bien regardé les gens en face qu’ils détournaient les yeux. Mais c’est dur.D’ailleurs,la majorité des gens ne regarde pas. Le plus pénible, c’est de rencontrer d’autres gens qui l’ont.»
D’autres gens qui l’ont… J’ai sous les yeux deux photographies. Un enfant sage, en blouse noire, avec l’étoile cousue dessus. Un vieillard épuisé, dans un grand manteau qui porte la même étoile infamante. Le premier est Lucien Ginsburg qui, plus tard, signera Serge Gainsbourg un 33 tours, Mauvaises nouvelles des étoiles. Le second était Max Jacob qui s’éloigna après un dernier poème : «Jadis personne ne me remarquait dans la rue, maintenant les enfants se moquent de mon étoile jaune. Heureux crapaud ! tu n’as pas d’étoile jaune.»


• Raphaël Sorin •

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