CHRONIC
de Philippe Meyer
Caricatures :
le silence irresponsable de l’Europe
L’affaire des caricatures danoises et de la réaction d’une grande partie du monde musulman est évidemment d’une gravité extrême. Beaucoup a été dit et écrit sur le sujet. De la manipulation des foules par les islamiques avides de violence, à l’importance centrale de la liberté de la presse ; de la colère que certains peuvent légitimement éprouver à la vue de dessins jugés offensants, aux moyens employés pour exprimer cette colère. Et c’est précisément ce dernier point qui doit le plus faire réfléchir occidentaux et défenseurs de la démocratie. Le recours à la justice et l’expression pacifiste d’un désaccord sont une chose ; la mise à feu d’ambassades et la manipulation de foules hystériques en sont une autre. Incendier volontairement des ambassades européennes en plein cœur de nombreuses capitales arabes est tout simplement inacceptables. Quelles qu’en soient les raisons. Au-delà même du caractère purement juridique, politique et diplomatiques de telles barbaries, il est des symboles auxquels on ne s’attaquent pas. Et ceux-là en font partie. L’ambassade est une enclave ; une parcelle appartenant au pays qu’elle représente ; et dans ce cas précis, une enclave de liberté et de démocratie dans des pays qui n’en comptent presque pas. Y mettre le feu par une foule en délire hurlant sa haine et crachant son venin est révélateur de ce que les islamistes ont toujours voulu chercher et continuent à chercher par tous les moyens : combattre la démocratie, combattre l’occident, combattre les valeurs de la liberté qui y sont associées. En un mot, le terrorisme. Des avions qui percutent des tours de bureaux, des kamikazes qui se font exploser au milieu de lieux de rencontres, des ambassades qui sont mises à feu. Trois moyens pour envoyer le même message au monde : l’islam politique est en guerre contre le monde démocratique et utilisent les symboles de liberté les plus forts pour le faire savoir. Que quelques pauvres dessins danois aient pu choquer certains – six mois après leurs sortie initiale - n’est en rien à la mesure des réponses apportées par ces fous de l’islam pour exprimer leur soit disante réprobation. De même le conflit israélo-palestinien n’avait rien à voir avec le 11 septembre, avec Londres ou avec Madrid, de même ces caricatures n’ont rien à voir avec cette traînée de violence mondiale. Faute de raisons rationnelles et justifiées, les islamistes ont besoin de prétextes fallacieux pour déclencher leur guerre et la mener comme ils l’entendent, à savoir par le terrorisme le plus barbare qui soit. Et une ambassade européenne qui brûle dans le centre de Téhéran ou de Damas n’est rien d’autre que l’expressions de ce terrorisme sauvage et lourd de sens. Que certains imams ou musulmans danois aient pu saisir la justice de LEUR pays pour s’en prendre au journal en question aurait été acceptable ; que les islamistes du monde entier expriment leur folie en brûlant drapeaux et ambassades, en appelant au meurtre, et faisant appel à la violence la plus crue ne peut pas l’être. Il s’agit là d’une déclaration de guerre, une de plus, contre un ennemi bien ciblé : le monde moderne, démocratique et laïque. Et comment réagit ce monde là, en l’occurrence les premiers concernés à savoir les pays européens ? Une fois de plus très faiblement. Face à ces images d’ambassades en feu, on aurait pu attendre une réaction forte et sans appel des politiques européens, de la presse européenne, des citoyens européens. Un cri venu de toute l’Europe et hurlant à l’unisson : nous sommes tous des dessinateurs danois ! Condamnation commune, forte et solennelle des dirigeants des 25 pays européens ; rappel officiel des vraies valeurs de la démocratie, manifestations citoyennes dans toutes les capitales européennes appelant à la liberté de la presse ; front uni des journalistes européens. Et pourtant. Rien de tout ça. Ou si peu. Combien de politiques a-t-on entendu en France ou ailleurs en Europe prendre résolument et sans ambiguïtés le parti de la caricature contre la censure ? A part le ministre de l’intérieur français, très peu. La réaction est globalement restée timide, contenue, presque cachée. L’Europe a peur de cet islam politique qui la menace. Pour des raisons qui sont toutes contestables (frilosité endémique, recherche permanente de la paix intérieure, volonté de ne pas choquer une partie de sa population, disparition des véritables combats politiques en son sein, culture du pacifisme, etc …) elle ne réagit que du bout des lèvres. Et encore, on a également entendu ici des excuses, ou là des appels à ne pas « heurter la sensibilité du monde musulman ». Près de soixante-dix ans après la honte de Munich, où les dirigeants européens s’étaient couchés devant Hitler, c’est à un nouveau Munich auquel on commence à assister en Europe. L’ennemi a changé d’uniformes, mais les motivations, les buts et les moyens d’y parvenir sont les mêmes. Osons toutefois encore espérer que le sursaut demeure possible. La France et l’Europe, à travers ses dirigeants, journalistes, intellectuels, doivent sans plus attendre relever la tête et dire non. Sans pour autant faire l’apologie des dessins mis en cause, il convient en revanche de combattre avec la plus grande force la violence crée par les islamistes qui ne font qu’utiliser cet épisode pour avancer un pion de plus vers leur objectif final. Les méthodes de l’islamisme réclament une réponse à la hauteur. Une réponse certes basée sur la justice, le droit, et les valeurs démocratiques, mais une réponse qui cherche enfin à stopper cette avancée des barbares et des criminels. Face à leurs aboiement incessants, le silence actuel de l’Europe est à cet égard totalement irresponsable. En attendant qu’il ne devienne responsable de maux bien plus graves, réagissons !
Philippe Meyer
Revue de presse, panorama du monde, blog de lutte contre l'antisémitisme et le racisme, ouvert au dialogue, l'autre image d'Israël, la culture juive à la rencontre de toutes les cultures, le monde juif tel qu'il est.
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