"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma  Ed Universlam


CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions
Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE
de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

lundi, décembre 10, 2007


LA VISITE DE KADHAFI
EN FRANCE


PASSERELLE
Source : lemonde.fr en ligne le 10 décembre



Et Kadhafi devint respectable

Le grand théâtre Kadhafi vient planter sa tente à Paris. Exotisme et numéro d'acteur garantis. Tirades iconoclastes probables, qu'il faudra encaisser sans trop sourciller. La santé de la balance commerciale hexagonale est jugée à ce prix, et les visites du Guide suprême de la Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste ne sont pas si fréquentes.

La dernière remonte à 1973. A cette époque, le personnage de Mouammar Kadhafi n'était pas encore sorti de ses limbes. Il n'était guère plus qu'une copie libyenne des "officiers libres" égyptiens déposant une monarchie usée jusqu'à la corde pour imposer le pouvoir du peuple.
Entre le jeune colonel putschiste au visage émacié d'alors et le despote aux traits épaissis d'aujourd'hui, les décennies se sont accumulées, avec elles les victoires et les revers, la somme de ces derniers l'emportant assez nettement sur les premières. Le temps de la dictature de la "révolution" et des "masses" est passé, le pragmatisme impose sa loi.
Les apparences, heureusement, sont sauves. L'extravagance reste le signe distinctif du Guide qui inventa au milieu des années 1990, au mitan de l'embargo international qui frappait son pays, une "voiture anti-accidents" pour mettre un terme aux hécatombes frappant la jeunesse du régime.
L'organisation de la Jamahiriya reste une source d'inspiration inépuisable pour les excentriques. Qui apprécie le titre de "secrétaire du comité populaire général" (premier ministre) raffolera de celui de "secrétaire de liaison extérieure" (ministre des affaires étrangères) et s'ébaubira devant la construction pyramidale des "congrès populaire général", "congrès populaires de base" et "comités révolutionnaires". Le tout au nom de la véritable démocratie : comme l'assène le Livre vert, précis plus que trentenaire de la révolution libyenne, la volonté de 51 % des citoyens imposée aux 49 % restant n'est qu'une imposture.
Au même titre que les drapés avantageux, les tuniques constellées de drapeaux ou d'effigies des pères fondateurs de l'Afrique et les lunettes de soleil, les saillies verbales font corps avec le personnage. Elles comportent leurs constantes : un "tiers-alter-mondialisme" dont témoigne également la liste des récipiendaires du prix de la Fondation Kadhafi pour les droits de l'homme (Evo Morales, Hugo Chavez, Fidel Castro, etc.) ; la légitimation du terrorisme pour les peuples "faibles" ou "opprimés" (en marge du sommet Europe-Afrique de Lisbonne, le 7 décembre, comme lors du sommet de la Ligue arabe d'Alger, en 2005) ; ou la faute inexpiable des colonisateurs de l'Afrique, rabaissés au rang de pillards sans scrupule, depuis que le Guide s'est donné la mission de conduire le continent à une improbable unité.


EXTRAVAGANCE ET PROVOCATION

C'est dans cette obsession qu'il faut d'ailleurs trouver l'explication du caractère bien tardif des retrouvailles franco-libyennes. "Que fait la France en Afrique ?", n'a cessé de s'exclamer Mouammar Kadhafi. Très vite, le Guide avait troqué le panarabisme laissé en déshérence à la mort de son modèle Nasser, et dont il se voulait le porte-étendard dès le milieu des années 1970, pour une politique africaine aux contours flous, aux moyens pas toujours orthodoxes, qui l'a souvent placé en conflit avec la France.
L'extravagance et la provocation calculées ne parviennent pourtant plus à donner le change. Après s'être longtemps perdu dans la quête de "troisièmes voies", entre socialisme et capitalisme, entre l'islam conservateur des Frères musulmans et le djihadisme inspiré par Sayed Qotb, Mouammar Kadhafi suit opiniâtrement depuis plus d'une décennie le cap d'un rapprochement avec l'Occident.
Il revient de loin. Le parrain financier et idéologique du terrorisme international, qualifié par Ronald Reagan de "chien enragé", est la cible d'un bombardement américain en 1986, après un attentat perpétré à Berlin, dans lequel un ressortissant américain a trouvé la mort. Puis son régime est accusé d'être à l'origine des opérations contre des avions de la PanAm et d'UTA, en 1988 et en 1989. Vue de Washington, la Libye est l'incarnation par excellence de "l'Etat voyou".
Les sanctions américaines et internationales (en 1992 puis en 1993) ont beau être plus légères que celles qui pèsent au même moment sur Bagdad, elles révèlent néanmoins l'isolement de Mouammar Kadhafi. Le Guide mesure les limites de la fraternité arabe. Il remâche son aigreur.
Les projets pharaoniques comme celui de la grande rivière artificielle qui, en 1996, achemine au moyen de conduites géantes installées par les Coréens l'eau pompée dans des nappes fossiles situées sous le désert, ne font guère illusion. Mais cette situation ne va pas durer bien longtemps.
A la suite d'une médiation de Nelson Mandela engagée en 1998, deux suspects libyens dans l'attentat de Lockerbie contre l'avion de la PanAm sont livrés (l'un sera condamné ultérieurement à la prison à vie) et les familles des victimes sont indemnisées. En 1999, les sanctions internationales sont suspendues – même si le régime continue de nier toute responsabilité.

Après le 11 septembre 2001, la Libye lève immédiatement toute ambiguïté. Une coopération sécuritaire fructueuse – compte tenu de sa parfaite connaissance des filières des groupes radicaux – est engagée avec les Etats-Unis. En décembre 2003, après l'offensive américaine contre le régime de Saddam Hussein, Mouammar Kadhafi renonce officiellement à un programme de destruction massive comprenant un volet nucléaire conçu en collaboration avec le "père" de la bombe atomique pakistanaise, Abdul Qadeer Khan.
"Rachat à bon compte d'une légitimité internationale, estime un expert du ministère de la défense français. Kadhafi a compris que ce programme, assez peu avancé, était devenu contre-productif." A-t-il eu peur d'une déstabilisation orchestrée par les Etats-Unis, comme naguère par l'Egypte ? "Avec le contexte nouveau créé par le 11-Septembre et la hausse des prix du brut, Kadhafi a vu qu'il avait un coup à jouer", assure Luis Martinez, spécialiste du Centre d'études et de recherches internationales (Sciences-Po Paris), auteur de The Libyan Paradox (Hurst, 2006).

Gilles Paris

Aucun commentaire: