ANTISEMITISME
Source : lejdd.fr en ligne le 28 décembre à 22h 27
sur Diasporablog à 23h
Dieudonné, triste con
Par lilianmass,
Au moment même où Israël perdait son sang froid dans la bande de Gaza, l’ex comique droit de l’hommiste Dieudonné M’Bala, devenu extrémiste antisioniste primaire, lâchait une de ces bombes qui le maintiennent encore en vie, médiatiquement parlant, en invitant à ses agapes un révisionniste gâteux pas drôle. L’année finit triste.
Ca faisait longtemps qu’on n’avait pas entendu parler de Dieudonné. L’ex petit ami de couleur d’Elie Semoun nous avait laissé après ses épousailles avec le Front National, ou ce qu’il en reste, de Jean Marie Le Pen et d’Alain Soral. Quelques longues semaines qu’on entendait plus de bons mots de cet agité du bocal, qui voit des génocides noirs partout, chez les pygmées ou chez les guyanais, chez les bantous, comme chez les papous. Et pour tout dire, ce silence ne nous pesait pas tant que cela : longtemps qu’on a cessé de rigoler aux provocations bas de plafond de ce qu’on pourrait appeler un bouffon, peu habile et totalement récupéré par de vagues extrêmes sans audience qui n’agitent que de maigres quartiers et quelques arrondissements. Longtemps que Dieudonné, en fait, n’a pas dit quelque chose de drôle. Ce qui était censé être son métier, il y a peu de cela.
Alors qu’aujourd’hui, c’est quoi, son métier ? Tribun, gourou, intégriste ? On ne sait pas trop. Un peu de tout cela, et surtout un grand malaise, incontestablement, ce malaise qui frappe toutes les vedettes soudain plongées dans le noir, soudain précipités derrière la caméra, à l’abri de tous les regards, donc soudain inutiles, vides, invisibles. Dieudonné, depuis de longs mois, ne sait plus comment exister encore, alors il frappe, au hasard, le plus fort possible.
Ce week-end, c’était dans une grande salle de spectacle, soi disant bien remplie, un show faussement baptisé « J’ai fait le con » alors qu’il aurait dû s’appeler « Je fais le con » tant Dieudonné avait délibérément choisi de s’enfoncer dans ce que lui-même donc reconnaît comme étant rien d’autre qu’une énorme connerie. Cette fois ci, le jeu consistait à inviter en guest star Robert Faurisson, révisionniste bas de gamme, agitateur de vieilles lune antisémites, qui n’intéresse plus personne mais qui répondit à l’invitation avec le plaisir évident de celui qui se rend compte que pour quelques illuminés il respire encore. Dieudonné accueillit chaleureusement le vieillard barbant et lui remit un prix de « l’infréquentabilité », lui faisant apporter son trophée par un assistant frisé grimé en prisonnier de camp de la mort, l’étoile jaune à la boutonnière, bonjour finesse.
Faurisson reçut son prix volontiers, baragouina quelques remerciements minables, tandis qu’à ses côtés un Dieudonné pas totalement à l’aise quand même assura à plusieurs reprises qu’il faisait tout cela au nom de la sacro sainte « liberté d’expression », reconnaissant quand même, en jetant souvent quelques regards inquiets sur ses arrières (crainte d’un attentat ?), qu’il faisait certainement là « sa plus grosse connerie ». Faute avouée est à moitié pardonnée, n’écrira pas Bernard Henri Lévy et tous les curés de la morale aujourd’hui, qui ne manqueront pas de gloser sur le nouveau scandale de ce comique un peu trop noir.
Une grosse connerie, oui, si on veut, mais c’est tout de même un peu court comme porte de sortie. Car il s'agit là à la fois d’une grosse connerie et d’une provocation minable. D’une monstruosité parfaitement préméditée, qui a juste pour objet non pas d’user à merveille de la liberté d’expression mais de se remettre dans la lumière, sous prétexte qu’on boycotterait injustement ce triste cuistre qu’est devenu l’ancien et très amusant collègue d’Elie Semoun. Une grosse connerie, oui, mais aussi une faute professionnelle, une blague dégueulasse, nulle et gratuite qui ne sert aucune cause, si ce n’est celle, douteuse, des antisionistes de tout poil, qui n’ont pas besoin de cela, à fortiori en ce moment, pour conchier Israël et l’ensemble des juifs de la planète.
Dieudonné est un parfait imbécile qui ne s’ignore pas. Un parfait imbécile qui considère qu’il a le droit de tout dire, y compris n’importe quoi, de tout faire, y compris avec n’importe qui, sous prétexte qu’on est en démocratie et que la liberté d’expression existe. Un parfait imbécile qui ensuite jurera ses grands dieux qu’il n’a pas voulu provoquer quoi que ce soit, qu’il est pour l’amitié entre les peuples, et que si on le condamne c’est au nom d’une pensée unique déplorable, qui bâillonne ceux qui pensent différemment que le bon peuple. Un parfait imbécile, mais pas un idiot : l’homme sait ce que manipuler veut dire, il a compris comme nombre d’autres bas du front, combien il pouvait être lucratif d’épouser quelques causes considérées comme justes ou nobles, telle que la défense du peuple palestinien ou la reconnaissance des crimes de l’esclavage. Ces niches là, profondes et obscures, abritent depuis longtemps déjà une ribambelle de clowns tristes et de faibles penseurs qui ne comprennent rien mais hurlent fort, aboient à tue tête, convaincus dans un bel ensemble que la juiverie mondiale dupe le monde, manipule l’information et trafique la vérité.
C’est sur Internet qu’on trouvera le plus de soutiens à Dieudonné, ce qui n’est pas étonnant : la toile et ses forums, et ses blogs, est vite devenue un terrain de jeu idéal pour les anonymes de tous crânes, rasés souvent, qui réfléchissent avec leurs pieds et sous couvert de pseudonymes s’accrochent à la théorie du complot comme Sarah Palin aux Ecritures, et déblatèrent, à longueur de discussions affligeantes et creuses sur les tours jumelles, le sionisme, les antisémites et les nazis, comme si leur vie n’était faite que de ça, de haine et de bêtise. Et il ne s’agit pas là de provocateurs ou d’humoristes douteux, non, tout cela est énoncé avec ce qu’il faut de franchise et d’assurance pour sembler pensé. Dieudonné profite de cette marée là, mazoutée, collante et tenace, pour survivre encore, à l’oubli et à l’insignifiance.
Ce n’est pas de la liberté d’expression qu’il profite, mais bien de la liberté de dire n’importe quoi, n’importe comment et à n’importe qui, sur laquelle prospèrent ce qu’on appelle les réseaux sociaux, clubs de rencontres ou blogs de soi disant journalistes reporters. Dieudonné, en invitant Faurisson, s’ancre donc bien dans son époque, où le bête côtoie trop souvent le minable. Dieudonné n’a plus rien à dire, mais s’acclimate à la logorrhée ambiante. Moins mortel qu’un bombardement, bien sûr, pas dangereux non plus, mais tellement crétin, et surtout bien dommage de la part d’un artiste qui était fort drôle, il y a quelques temps de cela, provocateur avec justesse et cynique avec élégance. Un artiste qui a tout perdu d’un coup, faute sans doute d’intelligence, et de talent.
Une idée tout de même pour son prochain spectacle : inviter et récompenser quelques membres du Bétar, sous les yeux de ses amis de la Tribu K, faire chanter un leader du Hamas ou jouer un sketch avec un représentant du Ku Klux Klan.
Qu’on rigole enfin.
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