RACISME,
ANTISEMITISME,
LESPLAIESINCURABLES
QUIFONTTÂCHE
AUPAYSDELADECLARATION
DELHOMME
Source : rue89.com en ligne le 18 mars 2012
Racisme ordinaire
dans un lycée du Loir-et-Cher :
« J'aime pas les Noirs »
Augustin Legrand,
Assistant d'éducation
« Augustin, nique ta race, j'aime pas les Noirs » ! Voilà comment m'a insulté un élève du lycée professionnel du Loir-et-Cher (41) dans lequel j'exerce le métier d'assistant d'éducation, en parallèle d'une activité journalistique.
Depuis le début de l'année, je fais observer, en vain, à mes supérieurs les lacunes que je constate en matière de gestion de l'alcoolisme, de l'hygiène ou du manque de nourriture. A cela sont venues s'ajouter ces injures pour lesquelles mes CPE se sont toutes deux contentées de répondre qu'elles n'étaient « pas étonnées ».
J'ai dû insister pour que l'élève reçoive une sanction. Celui-ci a été exclu trois jours, au lieu d'aller en conseil de discipline, pourtant prévu par le règlement intérieur. Une décision prise sans me concerter, et dont j'ai exprimé mes doutes quant à la vertu pédagogique.
Suite à cette sanction, j'ai été convoqué par les parents de l'élève, pour entendre son père vociférer. Ce dernier m'explique alors que les propos tenus par son fils ne sont
« pas bien graves ». Le proviseur, d'un ton convainquant, m'a alors incité à déposer plainte, m'indiquant par ailleurs qu'il appuierait ma démarche. La semaine suivante, pourtant, ce dernier me répondait que mon histoire était « du réchauffé ».
Des propos qui sont monnaie courante
A en croire l'ensemble de l'équipe éducative en charge de cet élève, celui-ci est coutumier des propos et des provocations racistes. D'ailleurs, dès le lendemain des injures qu'il proférait à mon encontre, il se battait, au sein même d'une classe de cours, avec un autre élève, après avoir traité celui-ci de « sale Noir ».
Un fait pour lequel aucune sanction n'a été prise. Car, selon mes CPE, ce genre de propos est tout simplement « monnaie courante » dans la bouche de très nombreux élèves, m'expliquant alors de manière insidieuse que c'est à moi, le seul membre de l'équipe pédagogique d'origine étrangère, de « faire avec » !
Face à mes remarques, mes CPE me font clairement comprendre que je suis trop « susceptible » et qu'il faudrait même, selon l'une d'elles, que je me « remette en question ». Et tout au long de ma tentative d'explication, soit durant plus d'une semaine, cette même supérieure n'aura de cesse de victimiser le jeune homme en question.
« Bien reçu, attendons lettre de démission »
Quant au proviseur, il affirme qu'il me trouve « trop critique ». Car selon lui, c'est à moi de faire l'effort de comprendre, puisque nous « avons affaire à un public d'élèves intellectuellement limités et dont les parents le sont tout autant » !
Depuis mon domicile, j'ai donc pris la décision d'envoyer un SMS commun à mes CPE, en leur expliquant, de manière détaillée et tout aussi ferme que courtoise, les raisons de mes doutes quant à ma capacité à pouvoir revenir travailler dans de telles conditions. Un SMS auquel l'on me répond, de manière laconique : « Bien reçu, attendons lettre de démission. »
J'ai donc alerté le rectorat et son service juridique. De même que l'inspection académique et le médiateur de l'Education nationale. Si certains ont été de bons conseils, m'indiquant notamment de ne surtout pas démissionner, je ne m'étendrai pas sur la complaisance et même l'absence totale de réaction des autres. « C'est comme ça dans tous les lycées de France », ai-je notamment entendu.
Afin de ne pas y retourner, j'ai dû demander à mon médecin un arrêt maladie. Mais je ne sais pas encore combien de temps je pourrais le faire renouveler.
Une procédure judiciaire à contrecœur
J'ai également pris, en mon âme et conscience, la décision de déposer une plainte à l'encontre du jeune homme, âgé de 18 ans, et je suis entré en contact avec un avocat qui, malgré son devoir d'objectivité, n'a pas pu s'empêcher d'exprimer son inquiétude et son ulcération. Une procédure judiciaire, que j'aurais volontiers préféré éviter, est donc en cours.
Or, je n'ai toujours pas compris comment de victime de propos à caractères racistes, qui auraient dû être condamnés sans la moindre ambiguïté par mes collègues et surtout par ma hiérarchie, j'ai pu devenir le « mouton noir » coupable de mon identité. Ni comment d'assistant d'éducation semble-t-il jusqu'alors apprécié et donnant pleine satisfaction, je suis devenu celui que l'on pousse à la démission.
Je suis noir depuis maintenant trente ans et je vis en France depuis l'âge de 4 ans. Or, je n'ai, de toute ma vie, jamais eu à ce point le sentiment que la parole raciste était aussi tolérée, excusée et même – c'est un comble – victimisée.
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