"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS

Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

Recueil de Poésie en Hommage à Jenny Alpha

Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma Ed Universlam

Couv "LES PLEURS DU MÂLE" Recueil de Slams d'Aimé Nouma  Ed Universlam


CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions

CAMILLE CLAUDEL Naissance d'une vocation parJeanne Fayard Rivages Editions
Sortie en librairie début mai 2013

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE

A LA RECHERCHE D'UNE MEMOIRE PERDUE
de GISELE SARFATI Editions PLUMES et CERFS-VOLANTS

dimanche, juin 10, 2007

PASSERELLE
Source : lefigaro.fr
en ligne le 9 juin


Retour sur une campagne
où tout le monde avait la tête ailleurs

Les uns étaient sûrs de perdre, les autres certains de gagner. Et Nicolas Sarkozy occupait tout l'espace...


C'EST l'histoire d'une campagne qui n'a jamais commencé. Une campagne pour de rire, une élection pour rien. Tous les rituels ont été pourtant respectés - les candidats se sont égayés dans leurs circonscriptions, les affiches placardées, les meetings organisés. Le président Sarkozy a réclamé une ample majorité pour appliquer son programme. Comme Chirac, Mitterrand, Giscard, Pompidou. De Gaulle. Nous sommes en 2002, 1998, 1981, 1978... Le parti du président est sûr de donner une majorité au président ; les autres sont certains de faire de la figuration. Ils ne font même pas semblant. Le Parti socialiste accepte d'avance sa défaite, mais supplie qu'elle soit la moins lourde possible ; François Bayrou s'agite pour « la diversité » ; les communistes pour ne pas mourir ; le FN pour ne pas couler : encore une minute, monsieur le bourreau. Les commentateurs, les médias, les sondeurs essayent désespérément de trouver des circonscriptions attrayantes, d'inventer des suspenses : Juppé conservera-t-il son siège à Bordeaux ? Et Bayrou le sien ? L'UMP aura-t-elle moins ou plus de quatre cents députés ?
Ils plaident tous dans le désert ; les Français ont la tête ailleurs. Les rituels parlementaires subsistent, mais ils sont vidés de leur substance. Comme si les Français avaient voulu démontrer à leurs élites, restées attachées à la tradition parlementaire, que leur lecture instinctive de la Ve République correspond bien à celle qu'a voulue le général de Gaulle : une monarchie républicaine, reposant sur le style bonapartiste de l'appel au peuple. Ils ont donné les clefs de la maison France à Sarkozy. Qu'il se débrouille !
Et il se débrouille bien. On ne voit que lui, courant en short et baskets, posant, solennel, devant des livres aux reliures classiques, auprès des drapeaux français et européen. Il occupe tout l'espace, le sature. À Malte, sur le bateau de Bolloré ; à Berlin, avec la chancelière Merkel ; à Bruxelles, avec Barroso ; à Paris, pour la passation de pouvoirs, avec Chirac, juste le temps d'essuyer une larme sur le visage de Cécilia. Le tourbillon permanent. Sarkozy est tout à la fois, président, premier ministre, ministre. Un jour, en visite dans une usine, un ouvrier, impressionné, l'appelle « monsieur le ministre ». Sarkozy se marre : « C'est plutôt sympa. Il pense que je suis au gouvernement. Moi aussi. » Il veut être tout. La droite, et toute la droite ; mais aussi la gauche et le centre, et jusqu'aux Verts. Il applique son programme et ceux de Bayrou et de Royal. Et même celui de Nicolas Hulot. Dans son gouvernement, il met en oeuvre la parité et l'ouverture. Des femmes et Bernard Kouchner. Brice Hortefeux, ministre de l'Identité nationale, mais aussi Rachida Dati, ministre de la Justice. Il veut à la fois démontrer à l'électorat populaire que la politique n'est pas morte, qu'elle peut encore modifier le cours des choses, en dépit de la mondialisation, et les directives de Bruxelles et, dans le même temps, donner des gages au politiquement correct médiatique, pour désamorcer définitivement cette « diabolisation » qui menaçait entre les deux tours de la présidentielle.
Les douze travaux d'Hercule. En courant. Parfois, les contradictions affleurent aux yeux les plus acérés. Après avoir tonné contre « la repentance », Sarkozy, à peine élu, a dû accompagner Jacques Chirac lors de la célébration de l'abolition de l'esclavage. Il a proposé le Quai d'Orsay à la fois à Hubert Védrine et à Bernard Kouchner. Le virtuose de la realpolitik et le french doctor ; l'eau et le feu. Mais pour l'instant, le mouvement sauve tout. Les Français adorent. Dans un sondage publié par Le Figaro, ils approuvent massivement toutes les mesures envisagées par le nouveau gouvernement. Seule la franchise médicale ne passe pas la rampe.
Derrière, tout le monde tire la langue. Ses amis d'abord. Sarkozy les avait pourtant prévenus : « La fidélité, c'est pour les sentiments ; l'efficacité, pour le gouvernement ». Patrick Devedjian, qui rêvait de la place Vendôme depuis vingt ans, dit tout haut, et drôlement, ce que tous les « amis de Nicolas » pensent tout bas, et en bougonnant : « Je suis pour aller très loin dans l'ouverture, y compris jusqu'aux sarkozystes. C'est dire. Parce que je pense que la fidélité n'est pas nécessairement contraire à la compétence. »
Les virés et les recalés se rabattent sur la future Assemblée ; Copé et Estrosi se disputent déjà la présidence du groupe UMP ; Ollier et Accoyer guignent le perchoir ; Raffarin et Devedjian, le parti. Sarkozy leur rappelle vertement qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Et confirme qu'il donnera bien la présidence de la commission des finances à un socialiste ; Pierre Méhaignerie s'en étrangle, tandis que Claude Goasguen se réjouit : il a plus de chances d'obtenir celle des lois.
Mais les quinze ministres ne sont pas davantage à la fête. Tanné par sa technostructure de Bercy, le nouveau ministre des Comptes, Eric Woerth, a cru pouvoir limiter la déduction fiscale des intérêts d'emprunts immobiliers, aux ventes signées après l'élection du nouveau président, le 6 mai. Nicolas Sarkozy profite d'un meeting au Havre pour tancer l'imprudent d'importance. Et tordre le cou à « la logique routinière de la machinerie administrative ». Tous les achats de résidence principale seront donc concernés. C'est la théorie de l'exemple. Depuis, les collègues de Woerth se le tiennent pour dit. Plus d'annonces avant que les mesures n'aient été arbitrées par l'Élysée. Même Martin Hirsch, qui avait d'abord contesté les « franchises médicales » annoncées, ne moufte plus.
On revient ainsi aux temps héroïques de la Ve République que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître : Pompidou, Giscard, qui faisaient tout et le reste aussi, surveillaient tout, contrôlaient tout.
Cette omniprésence et omnipotence sarkozienne ouvre enfin une fenêtre à des législatives sans passion. Ségolène Royal, au retour de ses vacances en Tunisie, adresse son salut aux électeurs « floués » par Sarkozy. François Bayrou, dépouillé de tous ses députés, prend la pose avantageuse du « résistant » au pouvoir absolu du président. Nouveau parti, nouveaux militants, nouveaux amis, chez les Verts surtout, avec Jean-Luc Benhamias et d'autres. Le centre vire à gauche. Bayrou se bat à mains nues : « Il est plus facile de céder. Il est plus juste de résister et de montrer de quel bois on est fait. » Mais on saisit vite qu'il ne présente pas de candidats pour avoir des élus, mais seulement pour obtenir la manne publique qui lui permettra de traverser un désert de cinq ans, jusqu'à l'oasis de 2012. Ses anciens amis font de même, regroupés au sein du Nouveau Centre, pour mieux assécher le rare espace du MoDem de Bayrou. À Pau, Bayrou lâche mélancolique : « La traversée du désert, je croyais l'avoir déjà faite ; je n'imaginais pas qu'après le désert, il y aurait encore le désert. »
Au Parti socialiste, les législatives sont le cadet des soucis partisans. Le futur congrès est en ligne de mire. Au Zénith, à Paris, le 29 mai, Royal, DSK, Fabius, Delanoë et Hollande, se passent une rose blanche de main en main en espérant que le voisin se pique avec les épines. DSK veut chasser de la rue de Solférino François Hollande : « l'unanimisme pour stratégie et l'habileté comme méthode. » Après beaucoup de tergiversations, après avoir renoncé à se présenter aux législatives, Ségolène Royal lui emboîte le pas. Elle aussi guigne la place de son compagnon, pour diriger le parti. Afin de ne plus avoir de concurrent en 2012. Feu sur le quartier général : « Le Parti socialiste doit continuer à revisiter la totalité de son logiciel. J'y prendrai toute ma place. »
De son côté, Jean-Marie Le Pen ne se remet toujours pas de s'être fait voler deux millions d'électeurs. Il rumine, non sans rendre hommage à son vainqueur, les raisons de sa défaite : « Nous avions devant nous un excellent prestidigitateur... J'ai été fait cocu ; je ne serai pas le premier ». Et déploie des efforts désespérés pour éviter que le sarkozysme triomphant ne ramène le Front national aux temps groupusculaires de ses débuts. « On peut faire de la politique dans une chambre de bonne », a-t-il encore la force de plaisanter. La chambre de bonne, les communistes y songent. Ils ont fait une croix sur leur groupe parlementaire ; ils cherchent seulement à éviter la ruine financière. Colonel-Fabien, combien le prix au mètre carré ?
Les acteurs font des efforts louables, mais le public s'obstine à détourner le regard. Même pas de sifflets, l'indifférence polie. Dans les décombres de la présidentielle, au milieu des ruines du FN, du PCF, des Verts et du centre, un bipartisme strict à l'anglaise s'esquisse. Révolution copernicienne dans le pays des trois cents fromages. Tout le monde s'en moque. Car tous ont compris que le Palais Bourbon était depuis longtemps un théâtre d'ombres, simple traducteur des directives bruxelloises. Bruxelles et nos partenaires regardent d'un oeil noir le « choc fiscal » français. Et les déficits ? Et la dette ? Pour leur vendre son « minitraité », Sarkozy fait patte de velours sur la Turquie. Et s'incline - provisoirement ? - devant la Banque centrale, qui augmente ses taux d'intérêt. En revanche, le nouveau président prend les patins de son prédécesseur pour défendre l'agriculture française. Et menace l'OMC d'un veto français. Combat tous azimuts. Attaques fougueuses là, reculs ici. Quand il avait pris ses fonctions, le nouveau premier ministre, François Fillon, avait exalté « l'identité nationale » et appelé au rassemblement patriotique. Son ancien patron, Philippe Séguin, parlait par sa bouche : « Dans un monde de six milliards d'humains, les soixante millions de Français doivent rester unis. »
Déjà, les années Chirac s'éloignent, aussi vite que l'avion qui emmène l'ancien président à Taroudannt. Seuls les juges s'en souviennent encore et songent à convoquer Jacques Chirac pour un éventuel compte bancaire au Japon. Interrogé sur cette éventualité, Alain Juppé ne cherche nullement à protéger son ancien patron. Il a déjà donné. Comme si pour lui aussi, une ère nouvelle commençait : « Il a un statut quand il est président de la République ; quand il n'est plus président de la République, il est un citoyen comme les autres. »

Tu quoque, fili !

Eric Zemmour

Aucun commentaire: