PASSERELLE
ENTREERICZEMMOUR
ETLEFRONTNATIONAL
Source : jeanmarielebraud.hautefort.com
en ligne le 19 février
ÉRIC ZEMMOUR
ET LE FRONT NATIONAL ....
Marine monte au front
Publié avec l'autorisation de l'auteur :
"Avec Marine Le Pen, le Front national n’a pas simplement changé de prénom, il a changé de siècle.
Vive la république ! » c’est par ce cri que Marine Le Pen a conclu son premier discours de présidente du Front national. Cela peut paraître banal.
En apparence seulement. Jean-Marie Le Pen préférait clamer un tonitruant « Vive la France et vive le Front national ». Non pas qu’il fromentât des complots contre la « Gueuse » ; non pas qu’il fût hostile à la république ou ne se soumît pas au suffrage universel.
Mais Jean- Marie Le Pen avait eu beaucoup de mal, depuis la création du FN, en 1972, à rassembler la famille nationale – comme il dit – et il ne tenait pas à provoquer certaines de ces composantes.
Eduqué dans sa jeunesse aux délices et poisons de la IVe République, il avait conservé l’art des politiques de cette période qui savaient, mieux que personne, marier les contraires au sein d’un Parlement hétérogène et tout puissant.
Or, le Front national a longtemps été un rassemblement hétéroclite de monarchistes et de républicains, d’anciens collabos mais aussi de résistants, de libéraux reaganiens et d’étatistes socialisants, de catholiques traditionalistes et d’athées, de pro-israéliens et de pro-arabes, de maurrassiens adeptes de la France seule et d’anticommunistes occidentalistes.
Sa fille n’a ni la culture d’un historien des idées, ni la rondeur négociatrice que son père, contrairement aux apparences, possédait au plus au point. C’est peut-être son principal handicap.
La « scissionnite » est une maladie congénitale de cette famille politique ; la sauvegarde de l’unité fut un miracle de chaque jour ; Le Pen caressait dans le sens du poil et successivement chacune des chapelles de son mouvement, ce qui explique bien des contradictions de son discours, et même sans doute certaines « bavures ».
Marine Le Pen se refuse à imiter son père. Elle ne sait pas et ne veut pas le faire. Elle le paie déjà de solides inimitiés, à l’extérieur et même à l’intérieur du Front. Sa raideur pourrait assez vite faire exploser le mouvement dont elle hérite. C’est peut-être une des raisons qui explique pourquoi son père a tenu à rester président d’honneur, et surtout, garder la petite structure – inconnue du grand public – qui recueille les fonds destinés à financer le Front national.
Mais son audace peut aussi être récompensée. Marine Le Pen ne proclame pas seulement son attachement formel à la république. Elle l’accompagne d’un retour aux sources de la république.
Son discours exalte la nation, le « seul bien des pauvres », comme disait Jaurès. Elle invoque la force de l’Etat contre les nouvelles féodalités, mafieuses, dans les banlieues, mais aussi financières, quand son père avait longtemps défendu les thèses antifiscalistes et antibureaucratiques héritées du poujadisme des petits commerçants dans les années 1950.
Tous les hommes politiques sont le reflet plus ou moins conscient de la sociologie de leur circonscription. Marine Le Pen n’échappe pas à cette règle.
Elue à Henin-Beaumont, dans le Nord anciennement ouvrier et ruiné par les délocalisations, où le chômage de masse s’accompagne de misère, d’alcoolisme, de violences. Le bouleversement tellurique de la mondialisation, avec son déménagement d’usines et de richesses, avec sa mise en concurrence féroce des travailleurs de tous les pays, y a laissé des traces indélébiles.
Marine Le Pen tient sur la mondialisation le même discours que la gauche de la gauche, de Mélenchon ou même de Benoît Hamon, tous ceux qui avaient appelé à voter « non » au référendum de 2005. Elle aussi critique les féodalités financières. Elle aussi en appelle à la protection de l’Etat.
Elle aussi réclame – comme son père cette fois – un protectionnisme français. Elle aussi dénonce l’Europe comme un cheval de Troie de la mondialisation, une Europe qui, présentée comme une protection, a au contraire ouvert les frontières de l’Union aux quatre vents.
Marine Le Pen enchaîne logiquement par une critique acérée de l’euro, dont elle réclame la sortie pour la France.
Cet argumentaire hostile à la mondialisation et à l’Europe n’est pas une innovation de Marine Le Pen ; son père, déjà, ne disait pas autre chose. Mais elle intègre cette critique dans un discours républicain.
Des esprits trop rapides ont cru que Marine Le Pen abandonnait le discours de son père sur l’immigration. Et ils furent tout surpris – ou feignirent de l’être – lorsqu’elle dénonça « l’occupation » des rues par les prières des musulmans du vendredi.
En vérité, Marine Le Pen détourne le thème le plus traditionnel du Front national : elle parle moins d’immigration et plus d’islam. Elle continue à condamner les 200000 entrées régulières d’étrangers par an (plus que sous le gouvernement Jospin !), mais elle dénonce bien plus que son père les atteintes de l’islam à la laïcité.
Marine Le Pen fait partie en cela d’un mouvement européen qui est en train de modifier les clivages traditionnels. Partout sur le continent, la présence de communautés musulmanes importantes, le réveil identitaire et religieux qui les parcourt, suscitent des réactions vives d’autochtones, quelles que soient leurs attaches traditionnelles à gauche ou à droite.
C’est surtout l’électorat populaire qui se révolte car ce sont eux qui côtoient les immigrés, et se sentent exclus de leur propre pays, les bourgeois pouvant se complaire dans un discours tolérant, à l’abri de ces « entre-soi » que la bulle spéculative mondiale a érigés dans les centres-villes de toutes les grandes métropoles.
C’est donc surtout à gauche que cette révolte laïcarde prend des voix.
La gauche, depuis trente ans, s’est convertie au modèle libéral américain, avec libéralisme économique d’un côté, multiculturalisme de l’autre, séduisant les classes sociales qui ont profité de la mondialisation, dans les services ou la finance. Les classes populaires – ouvriers, employés – mais aussi classe moyenne prolétarisée – petits fonctionnaires, commerçants ruinés par les grandes surfaces et la finance, petits agriculteurs – n’ont pas suivi cette évolution.
En Italie, en Hollande, la social-démocratie est laminée par ce que les médias appellent des « populistes » pour mieux les stigmatiser.
Ces « populistes » ne sont pas antisémites, ils sont même souvent pro-israéliens, ils n’ont pas sur l’évolution des mœurs depuis Mai-68, un regard exclusivement hostile.
Marine Le Pen fait incontestablement partie de cette mouvance, ce qui lui vaut des critiques acerbes venues de franges du Front national ou de l’extrême droite en général, qui lui reprochent d’être « vendue aux juifs ».
Partout en Europe, le débat s’organise autour de la mondialisation et de ses conséquences. Les vieux clivages hérités de l’histoire et de la guerre froide montrent peu à peu leurs limites, mais le conflit idéologique autour de la mondialisation tarde à s’imposer.
En France surtout. L’attachement viscéral des hommes de gauche à leur appartenance « au camp du progrès », des Lumières, freine les recompositions. Marine Le Pen joue son destin politique sur sa stratégie de dédiabolisation du FN.
Elle fait le pari que le rejet clair de l’antisémitisme lui ouvrira les routes du pouvoir.
Qu’avec son discours républicain, elle sera de plus en plus difficilement diabolisée.
L’élection présidentielle de 2012 sera le premier grand test de sa stratégie politique".
Eric Zemmour
pour le Spectacle du Monde
de février 2011
par Eric Zemmour
Publié dans : Chroniques d'Eric Zemmour
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"LES MUSULMANS ET LE SEXE" de NADER ALAMI Editions GUMUS
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Sortie en librairie début mai 2013
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