PASSERELLE
Source : lefigaro.fr en ligne le 23 juin
révélation Georges Malbrunot
Le pouvoir syrien tente de renouer avec Paris
Damas, qui cherche à sortir de l'ostracisme dont l'avait frappé Jacques Chirac, multiplie les manoeuvres d'approche, y compris auprès de Cécilia Sarkozy.
BOUSHRA Shawkat, la soeur du président Bachar el-Assad, a rencontré au printemps Cécilia Sarkozy, l'épouse de celui qui était alors le candidat UMP. L'entretien, révélé de sources diplomatiques, a eu lieu grâce à l'entremise de Nahed Ojjeh, figure mondaine parisienne et fille de l'ex-ministre syrien de la Défense, Moustapha Tlass. Mariée à Assef Shawkat, le tout-puissant patron des services de renseignements militaires syriens, Boushra jouit d'une influence certaine au sein de la famille Assad, qui gouverne la Syrie d'une main de fer. L'aînée des Assad vient régulièrement à Paris. À l'Élysée, dans l'entourage de la première dame de France, on se refuse à tout commentaire sur cette rencontre : « Je ne confirme ni ne démens », dit un proche de Cécilia Sarkozy.
À couteaux tirés avec Jacques Chirac, Damas souhaite reprendre le dialogue avec Paris, après avoir fait de même, en mai, avec Washington. Jadis principale alliée du régime syrien en Occident, la France a coupé les ponts avec Damas après l'assassinat, en février 2005 à Beyrouth, de Rafic Hariri, l'ancien premier ministre libanais. La France soupçonne les services de renseignements syriens d'avoir fomenté l'attentat contre l'ami personnel de Jacques Chirac.
Capacité de nuisance
« Les Syriens envoient des signaux, mais ce ne sont pas les bons », observe un connaisseur des relations franco-syriennes, qui confirme le lobbying de Damas auprès du nouveau pouvoir français. Le régime baasiste doit prochainement nommer un nouvel ambassadeur à Paris, le poste étant vacant depuis l'an dernier. Mais « il est encore un peu tôt pour parler aux Syriens », indique-t-on au Quai d'Orsay. Juste après l'élection de Nicolas Sarkozy, Paris n'excluait pas un dégel des relations franco-syriennes, délestées du caractère passionnel de la présidence Chirac.
« Puisque nous sommes prêts à parler à l'Iran, je vous recommande d'en faire de même avec la Syrie et l'opposition libanaise », aurait même conseillé Condoleezza Rice, la secrétaire d'État américaine, à son homologue Bernard Kouchner, en marge du sommet du G8 début juin en Allemagne. Quelques jours auparavant, le nouveau chef de la diplomatie française avait pris les devants en rencontrant à trois reprises à Paris le général libanais Michel Aoun, membre de l'opposition prosyrienne, qui était boudé sous la présidence Chirac.
Il y a quinze jours encore, « la porte (avec Damas) n'était pas complètement fermée », reconnaît-on au Quai d'Orsay. Ainsi, Jean-Claude Cousseran, le diplomate chargé de la préparation de la conférence sur le Liban prévue à la mi-juillet à Paris, n'excluait pas de se rendre en Syrie. Mais, depuis l'attentat qui, le 13 juin, a coûté la vie à Beyrouth au député sunnite Walid Eido, membre du courant Hariri, Damas n'est plus sur l'itinéraire de l'émissaire français. Comme si la capacité de nuisance syrienne hors de ses frontières avait une nouvelle fois dissuadé Paris.
La France souhaite que Damas affiche sa bonne volonté sur les nombreux différends qui empoisonnent les relations bilatérales, qu'il s'agisse du tribunal international mis en place pour juger les assassins d'Hariri - Damas refuse d'y coopérer -, des trafics d'armes en provenance de Syrie vers le Liban - constatés et dénoncés par les Nations unies -, sans parler de la déstabilisation de la vie politique libanaise à travers les assassinats répétés de dirigeants antisyriens, souvent d'ailleurs liés d'une manière ou d'une autre à la France, ou encore de l'appui, plus ou moins direct, aux rebelles islamistes du camp de Nahr el-Bared.
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